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DROIT DES SURETES

CAUTIONNEMENT

25 Octobre 2016

Cour d’appel de Ouagadougou - Articles 3, 4 et 13 AUS - Articles 14 et 23 AUS Révisé

Présentation des faits1

En date du 11 janvier 1999, un cautionnement a été consenti, jusqu’au 11 janvier 2000, par la Banque B., en garantie des titres de transport de la société L., d’un montant maximum de 2.000.000 de francs CFA.

Le cautionnement consenti par la Banque B. en garantie des titres de transport de la société L. d'un montant maximum de 2.000.000 de francs CFA en date du 11 janvier 1999 et valable jusqu'au 11 janvier 2000 ne comporte pas la signature du créancier, la société A., conformément aux dispositions de l'article 4 de l'Acte uniforme susvisé,

En outre, hormis la lettre datée du 27 mai 1999, adressée au directeur général de la Banque B. par la société A., dans laquelle elle demande le remboursement de la somme de 1.508.250 francs CFA, demeurée impayée par la société L. sur le fondement de la caution, il apparaît nulle part que la société A. ait entrepris une quelconque démarche auprès la société L. afin d'être payée.

Elle s'est adressée directement à la Banque B. en vue d'obtenir paiement de sa créance au mépris des dispositions de la loi, indiquant que la caution n'intervient qu'en seconde position pour suppléer à la carence de la société L., débiteur principal.

Par exploit d'huissier de justice en date du 06 septembre 1999, la Banque B. a formé opposition contre une ordonnance d'injonction d'avoir à payer la somme de 1.508.250 F à la société A.

Elle soutient que la caution sur laquelle s'est formée la société A. pour réclamer le paiement a été annulée et notifiée à cette dernière le 13 avril 1999 et que depuis cette date, la société A. ne l'a jamais saisi d'un quelconque problème relativement à l'annulation de la caution ni de ce que la société L. serait dans une difficulté quelconque. Elle demande en conséquence que la société A. soit déboutée de sa demande en paiement et condamnée aux dépens.

Par son jugement rendu le 11 octobre 2000, le Tribunal de grande instance de Ouagadougou a débouté la Banque B. de son opposition comme étant mal fondée.

La banque B. a alors interjeté appel de ce jugement, soutenant que l'acte de cautionnement ne comporte pas la signature des deux parties et qu’elle n’a pas été avisée par le créancier d'une quelconque défaillance du débiteur. La société A. conclut, pour sa part, à la confirmation pure et simple du jugement attaqué.

Décision de la Cour d’appel de Daloa

La Cour d’appel de Daloa rappelle tout d’abord que conformément aux articles 3 et 4 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés, le cautionnement, qui est un contrat par lequel la caution s'engage, envers le créancier qui accepte, à exécuter l'obligation du débiteur si celui-ci n'y satisfait pas lui-même, ne se présume pas quelle que soit la nature de l'obligation garantie. A peine de nullité, le cautionnement doit être consacré de façon expresse entre la caution et le créancier et doit être constaté dans un acte comportant la signature des deux parties.

La Cour d’appel rappelle ensuite qu’en vertu de l’article 13 du même acte, la caution n'est tenue de payer la dette qu'en cas de non-paiement du débiteur principal et ne peut être poursuivie par le créancier qu'après une mise en demeure adressée au débiteur et restée sans suite.

De ces dispositions légales, il en découle d'une part que le créancier doit accepter l'engagement de la caution et que cette acceptation sera matérialisée par l'apposition de sa signature sur l'acte qui doit être un écrit, de sorte que l'absence de la signature du créancier sur l'acte de cautionnement entraîne la nullité dudit acte2. D’autre part, l'engagement de la caution revêt un caractère subsidiaire, car celle-ci ne peut être poursuivie qu'en cas de défaillance avérée du débiteur principal.

En l’espèce, il ressort des débats et des pièces versées au dossier que le cautionnement consenti par la Banque B. ne comporte pas la signature du créancier, la société A. En outre, il n’apparaît nulle part que la société A. ait entrepris une quelconque démarche auprès de son débiteur principal afin d'être payée.

Par conséquent, la Cour d’appel de Daloa considère que c'est à tort que le premier juge a débouté la Banque B. de son opposition comme étant mal fondée et qu'il convient d'infirmer sa décision.

Bon à savoir

La jurisprudence dont question ci-dessus est une jurisprudence rendue sous l’empire de l’ancien Acte uniforme portant organisations des sûretés, lequel avait institué pour le cautionnement un formalisme obligatoire, en ce sens que la convention de cautionnement devait, sous peine de nullité, être conclue expressément entre la caution et le créancier et comporter la signature des deux parties3. L'objectif du législateur Ohada était de prévenir les droits de celui-ci et de renforcer la protection de l'autre4.

Le nouvel Acte uniforme portant organisation des sûretés a assoupli les règles relatives à la formation du contrat de cautionnement5.

Conformément à l’article 14 AUS Révisé, l’écrit et la signature de la caution et du créancier ne constituent désormais plus une condition de validité du cautionnement, mais uniquement une condition de preuve de ce dernier6.

Par ailleurs, la caution n'est tenue de payer la dette qu'en cas de non-paiement du débiteur principal et ne peut être poursuivie par le créancier qu'après une mise en demeure adressée au débiteur et restée sans suite7.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

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1. Cour d’appel de Daloa, Arrêt n° 115 du 28 juillet 2005, DBY c/ GVC WADAMA, Le Juris-Ohada, 2006/1, p. 39 ; Ohadata J-07-04, www.ohada.com

2. T.P.I. Abidjan, jugement n° 31 du 22 mars 2001, CSSPA c/ société Afrocom, Ecobank et BACI, Revue Ecodroit, Juillet-août 2001, n°1, p. 39

3. Articles 3 et 4 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés.

4. B. MARTOR et autres, Le droit uniforme africain des affaires issu de l’OHADA, LITEC, n° 1016, p. 215 ; P. TIGER, Le droit des affaires en Afrique – OHADA, PUF, 2ème éd., 2001, p. 86

5. K. M. BROU, « Le nouvel Acte uniforme portant organisation des sûretés et l’accès au crédit dans l’espace OHADA », Ohadata D-13-23, pp. 5-6, www.ohada.com 

6. Article 14 de l'Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés.

7. Article 13 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés ; Article 23 de l'Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés.