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DROIT DES SURETES

CAUTIONNEMENT

25 Octobre 2016

Section de Tribunal de Sassandra - Articles 13, 15 et 25 AUS – articles 23 et 36 AUS Révisé

Présentation des faits1

Madame A a vendu à Monsieur S. un véhicule d’occasion pour la somme de 1.400.000 F CFA. Monsieur N. s’est porté aval de Monsieur S, en concluant un contrat de cautionnement avec Madame A.

Toutefois, après avoir seulement fait un acompte de 350.000 F CFA, Monsieur S. ne daigne plus payer le reliquat malgré l’effectivité de la livraison et l’exigibilité de la créance. 

Madame A. a adressé à Monsieur S. une sommation par exploit en date du 11 juillet 2002, qui est restée sans effet. C'est donc à bon droit qu'elle est fondé à actionner N. en sa qualité de caution pour lui réclamer le paiement de ladite somme.

Se prévalant du cautionnement conclu avec Monsieur N., Madame A. a sollicité au Tribunal la condamnation solidaire de S. et de N. en leurs qualités respectives de débiteur principal et de caution solidaire au paiement de la somme de 1.050.000 F CFA, sur base des articles 13, 15 et 16 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés

Monsieur S. ne discute pas le bien fondé de la créance de Madame A.  Il précise toutefois avoir versé un acompte de 400.000 F CFA pour ramener sa dette à 1.020.000 F CFA. Il est disposé à verser 50.000 F CFA mensuellement pour faire face au reliquat réclamé.

Pour sa part, Monsieur N. soutient que son cautionnement est éteint. En effet, il explique d'une part que Monsieur S. l'a mis hors de cause et que d'autre part, celui-ci éteint sa dette principale en cédant son lot au profit de Madame S.

Décision du Tribunal de Sassandra

Sur la dette de Monsieur S.

Le tribunal de Sassandra observe tout d’abord que Monsieur S. ne conteste que le quantum de sa dette (1.400.000 F CFA). Ce dernier fait état du paiement d'une somme de 350.000 F CFA entre les mains de Madame A. et de 50.000 F CFA entre celles de son huissier instrumentaire, ainsi qu'il résulte d'un justificatif versé au dossier en date du 24 juillet 2002.

Il est acquis dès lors que le principal de la créance réclamée doit être fixée à la somme de 1.000.000 F CFA au principal.

Le tribunal décide que Monsieur S., même s’il ne reconnaît devoir cette somme à Madame A., doit être condamné à son paiement.

Sur le cautionnement de Monsieur N.


Le tribunal de Sassandra rappelle tout d’abord que les causes d'extinction du cautionnement sont énumérées à l'article 25 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés (article 36 AUS Révisé).

A propos de cet article, le tribunal fait deux observations : d'une part, la mise hors cause par le débiteur n'y figure pas et, d'autre part, la dation en paiement alléguée n'a pas été acceptée par Madame A. Le tribunal constate dans ces conditions que l'engagement de Monsieur N. en qualité de caution solidaire aux côtés de Monsieur S. n'a pas été éteint.

Par ailleurs, il résulte des articles 13 et 15 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés que la caution est tenue de payer la dette en cas de non-paiement du débiteur principal de la même façon que celui-ci.

Le tribunal considère dès lors qu’en entreprenant des poursuites contre N. après une mise en demeure adressée à S. et restée sans suite, Madame A. est bien fondée à solliciter la condamnation solidaire de la caution au paiement de sa créance et condamne Messieurs S. et N. aux dépens de l’instance.

Sur l'exécution provisoire

Le tribunal de Sassandra constate que Madame A. sollicite en outre l'exécution provisoire à hauteur du tiers du montant alloué.

Il existe, en l'espèce, un titre privé non contesté par Messieurs S. et N.

Par conséquent, le tribunal décide qu’il y a lieu de faire droit à la présente demande.

Bon à savoir

La mise hors de cause par le débiteur ne figure pas parmi les causes d'extinction du cautionnement énumérées par l'article 36 de l’Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés2. Par conséquent, c'est à tort que cet argument est avancé par la caution poursuivie.

En ce qui concerne la dation en paiement, rappelons qu’elle doit être valable et satisfactoire pour le créancier, car elle libère définitivement la caution même si le créancier est par la suite évincée de la chose qu’il a reçue, dès lors qu’il a accepté de recevoir du débiteur autre chose que ce qui était convenu3.

Ce risque que prend le créancier suppose qu'il ait accepté la dation en paiement4.

Or, en l'espèce la dation en paiement, à savoir la cession par le débiteur de son lot, au créancier n'a pas été acceptée par celui-ci. Dès lors, la dation en paiement n'a pas été valablement faite ; elle ne peut produire d'effet. La caution reste donc encore tenue, ce qui justifie sa condamnation solidaire avec le débiteur principal contre lequel la mise en demeure est restée sans suite5.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

_________________

1. Section de Tribunal de Sassandra, Jugement n°14 du 29 janvier 2003, dame A c/ S. et N., Le Juris Ohada, n° 2/2004, juin-août 2004, p. 69, note BROU Kouakou Mathurin, Ohadata J-04-306, www.ohada.com

2. Article 36 de l’Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés.

3. Y. KALIEU ELONGO, Sûretés personnelles dans l’espace OHADA, Yaoundé-Cameroun, Presses universitaires d’Afrique, 2005, p. 56.

4. F. ANOUKAHA et autres, OHADA. Sûretés, Bruylant. 2002 p. 39, n° 93.

5. K. M. BROU, « Note », sous Section de Tribunal de Sassandra, Jugement n°14 du 29 janvier 2003, dame A c/ S. et N., Le Juris Ohada, n° 2/2004, juin-août 2004, p. 69, note BROU Kouakou Mathurin, Ohadata J-04-306, www.ohada.com