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DROIT DES SURETES

CAUTIONNEMENT

25 Octobre 2016

Tribunal régional hors classe de Dakar - Articles 13 à 15 AUS – Articles 23, 26 et 30 AUS Révisé

Présentation des faits1

Par une convention de prêt participatif, transcrite au greffe du tribunal de céans le 16 février 1995, sous le n°116, Le FPE a consenti accorder un prêt participatif de 3.000.000 F CFA à Monsieur D., aux termes de 10% remboursables en cinq ans, dont un an différé. Par le même acte, Maître I., avocat à la Cour, s’est porté caution personnelle et solidaire en garantie du paiement de 16 amortissements de 244.797 F CFA.

La convention de prêt stipule en son article 2 que ce prêt sera versé à la SPF le Crédit Lyonnais Sénégalais, en compte bloqué, jusqu’à ce que la preuve soit rapportée que le financement a été bouclé.

Par lettre en date du 8 mars 1995, la SPF le Crédit Lyonnais Sénégalais a  demandé à l’administrateur du FPE de débloquer le financement des 3 millions accordés à Monsieur D.

Par une autre lettre datée du 1 mars 1995, le FPE y répondait positivement en ces termes :

« Nous vous prions de trouver ci-joint un chèque CITIBANK n°453 215 du 31 mars 1995 de 3 millions de francs CFA correspondant au déblocage de notre prêt participatif ».

Le montant de l’encours se chiffre actuellement à la somme globale de 3.916.752 F CFA, compte tenu des intérêts.

Suivant exploit d’huissier en date du 22 avril 2002, le Fonds de Promotion Economique (FPE) a assigné Monsieur D. et Maître I. en paiement solidaire de la somme de 3.000.000 F CFA, outre les intérêts, celle de 2.000.000 F CFA à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, l’exécution provisoire et leur condamnation aux dépens dont distraction étant également sollicitées.

Monsieur D. et Maître I. ont fait plaider au principal le non-respect des dispositions de l’article 9 du Code des Obligations Civiles et Commerciales (COCC), soutenant que la preuve du versement effectif des fonds n’a pas été rapportée et à titre subsidiaire que le FPE ne prouve pas qu’il y a eu défaillance du débiteur principal, condition nécessaire de la mise en cause de la caution.

Contrairement aux allégations de Monsieur D. et Maître I., le FPE n’a pas procédé au versement effectif des fonds prêtés à Monsieur D., mais a, conformément aux stipulations de la convention, procédé à la mise à la disposition de ce dernier desdits fonds, notamment au niveau du crédit lyonnais sénégalais. Il s’ensuit que la créance est bien fondée.

Il n’est par contre pas contesté que Maître I. s’est porté caution personnelle et solidaire pour le paiement, frais et accessoires compris, des 16 effets trimestriels de 244.797 F CFA, chacun tiré par le crédit Lyonnais Sénégalais pour le compte du FPE et accepté par Monsieur D.

Décision du Tribunal régional hors classe de Dakar

Sur le paiement de la somme de 3.000.000 F CFA

Le tribunal régional hors classe de Dakar rappelle tout d’abord que conformément aux dispositions des articles 13, 14 et 15 de l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, la caution peut être poursuivie après défaillance du débiteur principal, et doit être avisée d’une telle carence par le créancier. Elle est tenue, cependant, de la même façon que le débiteur principal.

Il se déduit de ces dispositions que l’engagement de la caution revêt un caractère subsidiaire. En outre, la défaillance du débiteur reste établie et portée à la connaissance de la caution par tout moyen.

Le tribunal régional estime que la carence de Monsieur D. se déduit suffisamment de la lettre qui lui a été adressée par l’Administrateur du FPE, lui demandant de se présenter à la Direction du Recouvrement et des affaires le mardi 17 juillet 2001, lettre dont il a accusé réception le 10 juillet 2001.

Par une autre lettre non datée annexée à la précédente, le FPE a informé Maître I. de la défaillance du débiteur principal.

Il apparaît ainsi que les formes prescrites par la loi ont été respectées.

Maître I. est donc tenu au paiement solidaire de la dette. Cette dette s’élevait au principal à 3 millions F CFA, à quoi s’ajoutent des intérêts fixés à 926.752 francs.

Par conséquent, il y a lieu de condamner Monsieur D. et Maître I. à payer solidairement au FPE la somme totale de 3.916.752
F CFA.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Le FPE sollicite également la condamnation de Monsieur D. et Maître I. à lui payer en outre la somme de 2.000.000 FCFA à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive.

Le Tribunal régional hors classe de Dakar estime que le fait pour Monsieur D. de ne pas payer une dette échue et certaine sans aucune justification sur sa défaillance suffit à caractériser la résistance abusive.

Une telle carence a été régulièrement notifiée à Maître I., caution solidaire, sans succès.

Il s’ensuit que la demande de dommages et intérêts est bien fondée et, partant, il y a lieu de condamner Monsieur D. et Maître I. à payer solidairement au FPE la somme de 200.000 francs à ce titre.

Sur l’exécution provisoire 

Le Tribunal régional hors classe de Dakar observe en l’espèce que la dette est suffisamment ancienne, de même que la défaillance du débiteur principal et la caution est manifeste.

Il s’ensuit de là que l’urgence et le péril en la demeure, se trouvent caractérisés.

Il y a lieu, dès lors, d’ordonner l’exécution provisoire, à hauteur de la somme de 500.000 francs.

Bon à savoir

Avant toute chose, le créancier ne peut mettre en jeu la caution que si le débiteur principal n’a pas effectué le paiement de l’obligation garantie (art. 23, AUS révisé)2.

Aussi, certaines conditions préalables doivent être satisfaites avant de poursuivre la caution. Ces exigences sont régies d’une part, par le droit commun relatif au recouvrement des créances. Ainsi, la créance doit être certaine, liquide et exigible3. D’autre part, le cautionnement possède un régime qui lui est propre : la défaillance du débiteur principal4.

Concernant ce régime spécifique du cautionnement, la défaillance du débiteur principal s’entend du non-paiement par celui-ci de la dette garantie. Dès lors, la caution ne peut faire l’objet de poursuites par le créancier qu’en second position5. A cet égard, le créancier est tenu de mettre en demeure le débiteur principal d’exécuter le paiement. En cas de défaut dans le mois suivant la mise en demeure précitée, le créancier doit avertir la caution de la défaillance du débiteur principal et lui préciser le montant restant dû en principal par ce dernier6.

La caution est tenue, cependant, de la même façon que le débiteur principal7.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque. 

 ________________

1. Tribunal régional hors classe de Dakar, jugement civil n° 2377 du 24 décembre 2003, FPE c/ Daouda Niang et Me Ibrahima Niang, Ohadata J-04-279, www.ohada.com

2. Sur l’article 13 de l’ancien Acte uniforme, voy. Cour d'Appel de Ouagadougou, arrêt n°83 du 3 décembre 2010, Société RAWANI International, BALLY Baba Seid, ALLETE Fatoumata c/ BICIA-B, Ohadata J-12-189, www.ohada.com

3. Article 1er de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. Pour un examen de l’exigibilité de la dette, voy. L. BLACK YONDO et autres, op. cit., pp. 92-93. Voy. également Tribunal de Grande Instance de Mbouda, jugement n° 01/CIV/TGI 2009 du 5 février 2009,  CRÉDIT COMMUNAUTAIRE D'AFRIQUE (C.C.A SA) c/ WAMBA Grégoire, Ohadata J-12-239, www.ohada.com

4. L. BLACK YONDO et autres, Le nouvel acte uniforme portant organisation des sûretés. La réforme du droit des sûretés de l’OHADA (sous la dir. de P. CROCQ), coll. Lamy Axe Droit, Rueil-Malmaison Cedex, Lamy, 2014, pp. 91-94.

5. Article 13, al. 1er et art. 23 de l’Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés.

6. Article 24, al. 1er de Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés ; L. BLACK YONDO et autres, Le nouvel acte uniforme portant organisation des sûretés. La réforme du droit des sûretés de l’OHADA (sous la dir. de P. CROCQ), coll. Lamy Axe Droit, Rueil-Malmaison Cedex, Lamy, 2014, p. 95

7. Article 26 de l’Acte uniforme révisé portant organisation des sûretés.