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RECOUVREMENT

RECOUVREMENT ABREGES JURIDIQUES

25 Octobre 2016

Cour d’Appel d’Abidjan - Articles 156 AUPSRVE

Présentation des faits1

Par acte du 5 juillet 1999, la Société A. a  pratiqué saisie attribution entre les mains de diverses banques et sur le compte de du débiteur de la banque C., Monsieur D.

Après vérification, la banque C. s’est aperçue que son client était Monsieur A. et non Monsieur S, qui lui, n’a pas de compte ouvert dans ses livres.

La banque C. a donc porté cette erreur à la connaissance du créancier saisissant, par exploit du 19 juillet 1999.

Eu égard à l'erreur de la banque C., la  société A. a introduit une action en justice et le juge a déclaré l’action fondée et a condamné la banque C. aux causes de la saisie.

Par exploit du 21 janvier 2002, la banque C. a relevé appel du jugement du 16 mai 2001 rendu par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan.

La banque C. reproche au premier Juge d’avoir fait une mauvaise interprétation de l’article 156 de l’Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution. Elle explique à cet effet, que ce texte vise une déclaration intentionnellement fausse, ce qui n’est pas assimilable à une erreur sur l’identité du client, erreur commise de bonne foi.

Par ailleurs, la banque C. soutient que les conditions d’une saisie attribution ne sont pas réunies, en ce sens que son client Monsieur A. n’est pas le débiteur de la Société A., et par conséquent, la banque C. ne saurait avoir la qualité de tiers saisi.

Décision de la Cour d’appel

La Cour constat qu’il n’est pas contesté par la société A. que le client de la banque C., nommé Monsieur A. n’est pas son débiteur.

Dès lors, la Cour estime que c’est à juste titre que la banque C. soutient que Monsieur A. n’est pas le débiteur saisi, et en conséquence, elle ne saurait être tiers saisi.

La Cour déclare que le premier Juge a fait une mauvaise interprétation des dispositions de l’article 156. En effet, la déclaration inexacte, incomplète ou tardive concerne incontestablement la situation du débiteur.

En l’espèce, il n’y a pas eu déclaration inexacte concernant le débiteur de la société A., mais tout simplement une erreur sur les identités, erreur commise de surcroît de bonne foi.

Par conséquent, la Cour infirme purement et simplement le jugement attaqué et déboute la société A. de sa demande.

Bon à savoir

Dans le cadre d’une procédure de saisie-attribution, le tiers saisi a une obligation essentielle qui est prévue par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, à savoir, une obligation de renseignement 2.

En effet, l’article 156 de l’AUPSRVE dispose que «  le tiers saisi est tenu de déclarer au créancier l'étendue de ses obligations à l'égard du débiteur ainsi que les modalités qui pourraient les affecter et, s'il y a lieu, les cessions de créances, délégations ou saisies antérieures. Il doit communiquer copie des pièces justificatives.

Ces déclaration et communication doivent être faites sur le champ à l'huissier ou l'agent d'exécution et mentionnées dans l'acte de saisie ou, au plus tard, dans les cinq jours si l'acte n'est pas signifié à personne. Toute déclaration inexacte, incomplète ou tardive expose le tiers saisi à être condamné au paiement des causes de la saisie, sans préjudice d'une condamnation au paiement de dommages-intérêts.
 » 3

Ainsi, le tiers saisi est tenu de renseigner l’huissier de justice lorsque la saisie est opérée entre ses mains et doit également transmettre des pièces justificatives. 4

Il est intéressant de préciser que la communication des pièces justificatives est obligatoire de sorte que la non-communication entraînera une sanction dans le chef du tiers saisi.

En ce qui concerne les sanctions, il faut noter que toute déclaration inexacte, incomplète ou tardive expose le tiers saisi à être condamné au paiement des causes de la saisie, sans préjudice d’une condamnation au paiement des dommages intérêts. 5

Autrement dit, le tiers saisi ne remplissant pas ses obligations vis-à-vis de l’huissier et du saisissant peut être condamné à payer à ce dernier les causes de la saisie, et éventuellement, des dommages et intérêts. 6

Cela étant, les articles 80 et 81 de l’AUPSRVE régissent les obligations du tiers saisi dans le cadre d’une saisie conservatoire et prévoient un cas d’exonération du tiers saisi. Effectivement, on fait mention du « motif légitime ».

La jurisprudence a ainsi précisé que dans le cadre d’une saisie-attribution, le tiers saisi peut également s’exonérer s’il a un motif légitime. 7

Toutefois, rien ne définit ce qu’il faut entendre par motif légitime. Dès lors, il revient au juge d’apprécier souverainement si le cas qui lui est soumis constitue ou non un motif légitime. 8

A cet égard, il y a lieu de préciser que le tiers saisi qui commet de bonne foi une erreur sur l’identité du débiteur,  ne fait pas une déclaration inexacte, incomplète ou tardive susceptible d’engager sa responsabilité.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque. 

_______________________________

1. Cour d’Appel d’Abidjan, n° 584, 3 mai 2002, Ohadata J-03-17.

2. Cour d'Appel de Niamey, Arrêt du 31/12/2003, www.ohada.com, Ohadata J-10-278 ; L. SENE M., « La responsabilité du tiers-saisi », Jurifis Info, n° Décembre 2010, p. 28.

3. Article 156 AUPSRVE.

4. Tribunal de Première Instance d'Abidjan, Arrêt du 09/01/2008, www.ohada.com, Ohadata J-13-51.

5. Arlette BOCCOVI, observations sous arrêt CCJA n° 015/2009 du 16 avril 2009 in Revue de l’ERSUMA, numéro spécial Novembre/Décembre 2011, p. 129.

6. Cour d’Appel de Douala, Arrêt du 14 janvier 2009 : Aff. Les Ets CHIDJOU c/ SCDP précité.

7. Cour d’Appel de Douala, Arrêt du 14 janvier 2009 précité.

8. Cass., 2e Ch. 4 octobre 2001, Civ. Bull. Civ. II, n° 152.