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DROIT DES SOCIETES

Abrégés juridiques

10 Novembre 2015

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La société créée de fait et la société de fait

La societe creee de fait et la societe de fait

La société créée de fait et la société de fait sont définies par le droit OHADA qui a précisé le contenu des deux notions, aux articles 864 et 865 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

Il y a société créée de fait, lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales se comportent comme des associés sans avoir constitué entre elles l’une des sociétés reconnues par l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique 1.

En revanche, il y a société de fait, lorsque deux ou plusieurs personnes physiques ou morales ont constitué entre elles l’une des sociétés reconnues par le présent Acte uniforme mais qui comporte un vice de formation non régularisé ou ont constitué entre elles une société non reconnue par le même Acte 2.

Cette définition est à combiner avec la disposition de l’article 115, qui prévoit également l’hypothèse où les associés ont souhaité créer une société, mais n’ont pas établi par écrit le contrat de société (ou, le cas échéant l’acte unilatéral de volonté) 3.

La distinction entre société de fait et société créée de fait ne réside qu’au niveau de leur processus de création respectif 4.

L’existence d’une société créée de fait ou d’une société de fait peut être prouvée par toute voie de droit 5. Ainsi, cette preuve peut être rapportée par la déclaration des parties et des témoins, lesquels ont démontré l’existence d’investissements et de dépenses communes dans l’exploitation d’une boutique 6. A contrario, l’absence d’apports suffit à caractériser l’inexistence d’une société de fait 7.

Au niveau des éléments constitutifs de la société créée de fait ou de la société de fait 8, il y a lieu tout d’abord d’établir que des apports (en numéraire, en nature ou en industrie) ont été effectués. La démonstration d’apports suffisamment déterminés permet d’identifier les membres de la société 9. Il a ainsi été décidé que celui qui n’a pas, dans l’exploitation commune d’un laboratoire, fait d’apports ne dispose pas de la qualité d’associé 10.

La recherche des bénéfices et la contribution aux pertes sont également retenus comme un critère de reconnaissance de la société créée de fait ou de la société de fait 11.

L’affectio societatis, défini comme la volonté de collaborer à une entreprise commune est un élément qui devra aussi être démontré. Il a ainsi été jugé que les nombreux voyages à l’étranger effectués par les parties dans le cadre de l’Acte dit « Attestation d’association », illustrent cette volonté 12.

Peu importent les dispositions dont les membres de la société de fait ont pu convenir, le régime juridique applicable aux sociétés créées de fait ou aux sociétés de fait, dont l’existence a été reconnue en justice, est celui qui s’applique aux sociétés en nom collectif 13.

Ainsi, tous les associés sont responsables indéfiniment et solidairement des dettes de la société 14.

Il convient, en outre, de rappeler que les créanciers sociaux doivent préalablement s’adresser à la société débitrice ; ce n’est qu’en cas de défaillance de celle-ci qu’ils peuvent poursuivre les associés 60, voire 90 jours plus tard 15.

Par ailleurs, l’associé qui se retire de la société reste, même après son retrait, tenu solidairement et indéfiniment envers les tiers des dettes sociales antérieures à celui-ci 16.

Enfin, s’agissant de la dissolution et de la liquidation de la société créée de fait ou de la société de fait, il y a lieu de se référer aux règles de la société en nom collectif (articles 290 à 292 de l'Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique) 17.

Plus spécifiquement, lorsqu’il n’y a plus d’affectio societatis dans une société de fait, la dissolution de cette société doit être prononcée conformément aux articles 200-5 et 201, alinéa 2 de l’AUDSC et, partant, la société doit être liquidée selon l’article 868 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique 18.

_______________

1. Article 864 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique ; TGI Ouagadougou (Burkina Faso), Jugement commercial n° 215 du 21 février 2001, STTP Sarl c/ Société africaine de services SA et SOFITEX, cité dans J. GATSI, OHADA, Code des sociétés commenté et annoté, Douala, PUL, 2011, note sous art. 864 de l’AUDSCGIE, p. 186 ; F.-X. LUCAS, « La société dite “créée de fait” », in Mélanges offerts, Guyon, Dalloz, 2003, p. 738.

2. Article 865 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

3. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique (OHADA), Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 763.

4. F. BIBOUM BIKAY, « Les situations de fait en droit des sociétés de l’Ohada », R.D.U.S., 2013, p. 838.

5. Article 867 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

6. Cour d’appel de Dakar, arrêt du 20 janvier 2003, Gueye c/ Gueye, Ohadata J-03-147, www.ohada.com.  

7. Cour suprême de la Côte d’Ivoire, ch. judicaire, arrêt n°570-02 du 4 juillet 2002, Wan Kul Lee c/ Kuk Hyun, Ohadata J-04-64, www.ohada.com

8. Ce sont les conditions de validité d’une société, mentionnées à l’article 4 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique. Voy à cet égard : B. DIALLO, « La société créée de fait dans l’OHADA », note sous CCJA n° 31, 04 novembre 2004,  Ayant droit de B. c/ Madame A, art. précité, p. 18 ; À titre de droit comparé Marie-Hélène MALEVILLE, « Sociétés et groupement particuliers - Société créée de fait », note sous Cass. com., 5 avril 2005, en ligne : http://www.institut-idef.org/

9. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique (OHADA), Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 764.

10. Cour suprême de la Côte d'Ivoire, arrêt n°570-02 du 4 juillet 2002, Wan Kul Lee c/ Kuk Hyun, Ohadata J-04-64, www.ohada.com.

11. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique (OHADA), Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 764.

12. Cour suprême de la Côte d’Ivoire, arrêt n°152/04 du 11 mars 2004, Adama Koita, Odie Mathieu c/ Assane Thiam, Sodefor, Ohadata J-05-125, www.ohada.com.

13. Article 868 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

14. Article 270 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

15. Article 271 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

16. Article 292 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique ; A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique (OHADA), Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 7648.

17. Article 868 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

18. Tribunal de commerce de Bamako, jugement n° 281 du 03 novembre 1999, Amadou Koïta c/ Boubacar Tapo, Ohadata J-02-41, www.ohada.com