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ARBITRAGE

ABREGES JURIDIQUES

25 Octobre 2016

Cour Commune de Justice et d'Arbitrage - Article 13 AUA

Présentation des faits1

Le 07 octobre 2002, la société G a signé un contrat avec la société E qui prévoit que cette dernière devait se charger de la construction d’une clôture de 200 mètres linéaires en tôle à la décharge d’Akouédo.

Le délai laisser à la société E pour réaliser cette construction était de trois mois à compter de la signature du contrat. La facture devait, quant à elle, être payée par la société G dans les 45 jours de la fin des travaux.

L’article 14 du contrat signé entre les parties prévoyait que tout litige qui surviendrait dans l’application du contrat serait soumis à un règlement amiable et qu’en cas d’échec, le litige sera porté devant la Cour d’arbitrage d’Abidjan conformément à la procédure de médiation-conciliation en vigueur.

La société a réalisé les travaux dans les délais mais la société G était dans l’impossibilité de payer la facture dans le délai contractuel. Par conséquent, les parties se sont mis d’accord pour prévoir une pénalité par jours de retard du paiement de la facture.

Voyant que la société G ne respectait pas ses engagements, la société E, après plusieurs mises en demeure, a notifié le 27 novembre 2003 par lettre à la société G sa renonciation à l’application de l’article 14 du contrat, à savoir, la clause compromissoire de recours à la Cour d’Arbitrage d’Abidjan.

La société E a onc saisi, le 12 janvier 2004, le Président du Tribunal de Première instance d’Abidjan d’une requête d’injonction de payer.

Le président avait fait droit à a demande de la société E. La société G a fait opposition mais le Tribunal l’a déchue de son acte d’opposition. La société G a alors fait appel de ce jugement. La Cour d’appel a déclaré l’appel fondé et a infirmé le jugement.

La société E s’est pourvu en cassation contre cette décision.

Décision de la Cour

La Cour constate que les parties avaient prévues une clause compromissoire dans le contrat qui les liait, à l’article 14.

La Cour considère que le Tribunal de Première Instance d’Abidjan n’est en principe pas compétent pour trancher le litige entre les parties étant donné qu’il y a une clause compromissoire attributive de compétence.

Cela étant, la Cour rappelle que s’il est vrai que l’autonomie de la volonté des parties légalement exprimée à travers une clause compromissoire tient lieu de loi à ces parties, cette autonomie ne doit être respectée que si elle repose sur la loyauté des parties qui ne peuvent se contredire lorsque, par son comportement empreint de mauvaise foi, l’une des parties fait perdre la confiant à l’autre partie.

En l’espèce, la Cour estime que la renonciation expresse, certaine et non équivoque de la société E à l’application de la clause compromissoire ne peut s’analyser qu’en une juste sanction au comportement unilatéral de la société G qui est demeurée indifférente à toutes les démarches entreprises par la société E.

Par conséquent, la Cour déclare l’action intentée par la société E comme fondée et ressortissant de la compétente du juge étatique et non de l’arbitrage.

La Cour casse l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’Abidjan et condamne la société G à payer la somme de 78.569.573 FCFA à la société E.

Bon à savoir

La convention d’arbitrage peut être définie comme étant un accord entre deux ou plusieurs personnes physiques ou morales qui conviennent de soumettre les éventuels litiges nés ou à naître à l’arbitrage.2

La Convention d’arbitrage dispose d’une autonomie matérielle ainsi que d’une autonomie juridique.

Le principe de l’autonomie matérielle de la convention d’arbitrage est repris expressément à l’article 4 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage. En effet, l’article 4 de l’acte uniforme dispose que : « La convention d'arbitrage est indépendante du contrat principal. Sa validité n'est pas affectée par la nullité de ce contrat et elle est appréciée d'après la commune volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique.»3

L’autonomie juridique de la convention d’arbitrage vise, quant à elle, les règles qui gouvernent la convention proprement dite. Il ne faut pas confondre cette autonomie juridique avec l’autonomie matérielle qui consiste à envisager la convention d’arbitrage eu égard au contrat qui la contient.4

L’Acte uniforme prévoit en son article 4 le principe de l’autonomie juridique étant donné qu’il dispose que la convention d’arbitrage : « est appréciée d'après la commune volonté des parties, sans référence nécessaire à un droit étatique. »

Un des effets de la convention d’arbitrage est de rendre les juridictions étatiques incompétentes pour trancher le litige né entre les parties.5

Ceci est d’ailleurs clairement repris dans l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage qui dispose en son article 13 que «  Lorsqu'un litige, dont un Tribunal arbitral est saisi en vertu d'une convention arbitrale, est porté devant une juridiction étatique, celle-ci doit, si l'une des parties en fait la demande, se déclarer incompétente. »6

Eu égard à l’article 13 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, si une partie saisie le juge étatique, malgré l’existence d’une clause compromissoire, l’autre partie peut soulever l’incompétence du juge étatique.

Ceci étant dit, la convention d’arbitrage naît de la volonté des parties, par conséquent, ces dernières peuvent renoncer tacitement ou expressément à soumettre leur litige à l’arbitrage.7 La renonciation est considérée comme étant tacite lorsqu’une clause compromissoire existe et qu’une des parties saisi le juge étatique, et que l’autre partie, ne soulève pas l’incompétence de ce dernier.8

En outre, le respect d’une clause compromissoire visant à recourir à l’arbitrage peut être remis en cause en raison du comportement de mauvaise foi d’une des parties. Ainsi, ne viole pas la clause compromissoire la partie qui, après des multiples démarches rester sans réponses visant à régler amiablement le différend, renonce par courrier à la clause compromissoire et saisi le juge étatique.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.
_________________________________

1. Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, arrêt du 08 mars 2012, www.ohada.com, Ohadata J-14-147.

2. G. DAL et F. TCHEKEMIAN., « Le droit OHADA de l’arbitrage », DAOR, 2014, liv. 110, 165.

3.  Article 4 de l’Acte Uniforme.

4. P. MEYER, OHADA – Droit de l’arbitrage, Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 86 et suivantes.

5. Cour d’Appel du Littoral, Arrêt n° 39/REF du 08 janvier 1997, Revue Camerounaise de l’Arbitrage n° 11 – Octobre - Novembre - Décembre 2000, p. 12 ;  C.C.J.A., Arrêt du 24/04/2008,  n° 020/2008, Actualités juridiques, n° 63, p. 147.

6.  Article 13 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage.

7. G. DAL et F. TCHEKEMIAN., « Le droit OHADA de l’arbitrage », DAOR, 2014, liv. 110,

8. CCJA, 1ère ch., arrêt n°09 du 29 juin 2006, www.ohada.com, Ohadata J07-23.