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ARBITRAGE

Abrégés juridiques

23 Avril 2015

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L'incompétence du juge étatique en présence d'une clause compromissoire

L incompetence du juge etatique en presence d une clause compromissoire

Les parties à un contrat peuvent prévoir que, si un différend naît entre elles, ce dernier sera tranché par le tribunal arbitral.

Pour ce faire, les parties doivent prévoir une convention d’arbitrage ou une clause compromissoire.  En principe, la clause compromissoire est mise en œuvre dès que l’instance arbitrale est en cours, c’est-à-dire, dès que les arbitres ont acceptés leur mission. 1

Un des effets de la convention d’arbitrage est de rendre les juridictions étatiques incompétentes pour trancher le litige né entre les parties. 2

Ceci est d’ailleurs clairement repris dans l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage qui dispose que «  Lorsqu'un litige, dont un Tribunal arbitral est saisi en vertu d'une convention arbitrale, est porté devant une juridiction étatique, celle-ci doit, si l'une des parties en fait la demande, se déclarer incompétente. » 3

Par contre, si le tribunal arbitral n’a pas encore été saisi, la juridiction étatique doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage ne soit manifestement nulle. 4 A cet égard, il est utile de préciser que la caducité d’une clause compromissoire n’entraîne pas la nullité de celle-ci. 5

Eu égard à l’article 13 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage, si une partie saisie le juge étatique, malgré l’existence d’une clause compromissoire, l’autre partie peut soulever l’incompétence du juge étatique.

Il s’agit bien d’une incompétence du juge étatique (une exemption de procédure) et non d’une fin  de non-recevoir. En effet, le juge étatique n’est pas compétent car une clause compromissoire existe entre les parties, mais, ce n’est pas un défaut de pouvoir étant donné que si les parties renoncent à l’arbitrage ou si le délai d’arbitrage expire, le juge étatique retrouve sa compétence pour trancher ce litige. 6

En état de cause, la juridiction étatique ne peut relever d'office son incompétence de sorte que c’est à une des parties au litige de soulever cette incompétence.

Il est important d’envisager quand la question de savoir à quel moment la partie doit soulever l’exception de procédure, à savoir, l’incompétence du juge étatique ?

Le droit commun prévoit que cette incompétence doit être soulevée avant le débat de fond, et ce, sous peine de forclusion. 7

Ceci étant dit, la convention d’arbitrage naît de la volonté des parties, par conséquent, ces dernières peuvent renoncer tacitement ou expressément à soumettre leur litige à l’arbitrage 8. La renonciation est considérée comme étant tacite lorsqu’une clause compromissoire existe et qu’une des parties saisi le juge étatique, et que l’autre partie, ne soulève pas l’incompétence de ce dernier. 9

Ainsi, l’incompétence du juge étatique n’est pas absolue mais est une incompétence relative.

Il est important de préciser que l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle à ce qu'à la demande d'une partie, une juridiction étatique, en cas d'urgence reconnue et motivée ou lorsque la mesure devra s'exécuter dans un Etat non partie à l'OHADA, ordonne des mesures provisoires ou conservatoires, dès lors que ces mesures n'impliquent pas un examen du litige au fond, pour lequel seul le Tribunal arbitral est compétent. 10

En conclusion, le juge étatique n’est pas compétent pour juger le fond de litige lorsqu’il est en présence d’une clause compromissoire, le juge étatique n’est pas compétent, non plus, lorsque le tribunal arbitral a déjà été saisi du litige.

Il est, toutefois, compétent pour rendre des mesures provisoires si le tribunal arbitral n’a pas été préalablement saisi. Il est également compétent pour trancher le fond du litige si la clause compromissoire est nulle. Enfin, le juge étatique est compétent si les parties n’ont pas soulevé son incompétence avant le débat au fond et ont renoncées à soumettre le litige au tribunal arbitral. 11

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1. Cass. Civ, 25 avril 2006, n° 05-13749.

2. Cour d’Appel du Littoral, Arrêt n° 39/REF du 08 janvier 1997, Revue Camerounaise de l’Arbitrage n° 11 – Octobre - Novembre - Décembre 2000, p. 12 ;  C.C.J.A., Arrêt du 24/04/2008,  n° 020/2008, Actualités juridiques, n° 63, p. 147.

3. Article 13 de l’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage.

4. Voyez : Civ., 26 juin 2006, Rev. arb., 2001, p. 529.

5. Cass., 1ère chambre civile, 11 février 2009, n° 08-10341.

6. B. Y. MEUKE., « Recours devant une juridiction étatique de l'espace OHADA et clause compromissoire : "A quel moment doit-on soulever l'incompétence de la juridiction étatique pour que la mise en œuvre de la clause compromissoire ne soit pas tardive ?" », Jurifis Info n° 10, mars-avril 2011, p. 1 et suivantes.

7. Cass., 2e  civ. 22 novembre 2001, n°99-21662.

8. G. DAL et F. TCHEKEMIAN., « Le droit OHADA de l’arbitrage », DAOR, 2014, liv. 110, 171

9. CCJA, 1ère ch., arrêt n°09 du 29 juin 2006, www.ohada.com, Ohadata J07-23.

10. N. AKA., « Les mesures provisoires et conservatoires en matière d'arbitrage », Revue camerounaise de l'arbitrage, numéro spécial, février 2010, p. 93 ; Cour d’appel du Littoral, Arrêt n° 81/REF du 15 mai 2000, Revue Camerounaise de l’Arbitrage n° 12 – Janvier - Février - Mars 2001, p. 14

11. B. Y. MEUKE., « Recours devant une juridiction étatique de l'espace OHADA et clause compromissoire : "A quel moment doit-on soulever l'incompétence de la juridiction étatique pour que la mise en œuvre de la clause compromissoire ne soit pas tardive ?" », Jurifis Info n° 10, mars-avril 2011, p. 1 et suivantes.