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DROIT DES SOCIETES

DROIT DES SOCIETES ABREGES JURIDIQUES

25 Octobre 2016

Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou - Articles 159 et 160 AUSCGIE (Révisé)

Présentation des faits1

Suivant exploit du 23 octobre 2013, Monsieur N. a fait assigner devant le Président du Tribunal de première instance de céans, Monsieur T. et Madame M. aux fins de voir annuler l’ordonnance n°557/12 du 10 octobre 2012.

Au soutien de son action, Monsieur N. fait valoir que dans le cadre de la société C., les dimensions avec la gérante statutaire, Madame M., ont justifié, en date du 24 octobre 2011, la saisine par lui du juge des référés aux fins de reddition des comptes.

Faisant droit à la demande de Monsieur N., le juge des référés a désigné Monsieur T., expert judiciaire, par ordonnance n°388 du 29 décembre 2011, avec pour mission d’effectuer un audit de gestion de la société C. Au terme de cette mission, Monsieur T. a obtenu une ordonnance, l’ordonnance n°557/12 du 10 octobre 2012, fixant ses honoraires à la somme de 13.600.000 FCFA.

Monsieur N. sollicite que soit annulée cette ordonnance n°557/12.

Décision du Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou

Sur la demande en annulation de l’ordonnance n°557/12 du 10 octobre 2012 

Le Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou rappelle tout d’abord qu’en vertu de l’article 1er de l’acte de délibération de l’ATCAM du 25 novembre 19522, il est alloué à chaque expert désigné conformément aux lois et règlements sur la répression des fraudes en matière commerciale, pour l’analyse de chaque échantillon, y compris les frais de laboratoire, pour le premier échantillon, 1200 francs et pour les échantillons suivants dans la même affaire, 750 francs.

Cependant, en la présente cause, Monsieur T. a été désigné, en sa qualité d’expert aux fins d’un audit de la société C., pour la période allant de la création au 31 décembre 2010.

L’objet de cette mission ne saurait être concilié aux dispositions légales énoncées ci-avant, de sorte que le moyen de Monsieur N., en cette branche, manque de pertinence.  

Par conséquent, il convient de le rejeter.

Par ailleurs, le Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou rappelle que conformément à l’article 159 de l’Acte uniforme OHADA portant sur les sociétés commerciales et le groupement d’intérêt économique, « un ou plusieurs associés représentant au moins le cinquième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander au Président de la juridiction compétente du siège social, la désignation d’un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ».

L’article 160 du même Acte énonce que les honoraires de l’expert désigné par le juge sont supportés par la société.

Il résulte de ces dispositions que la mission de l’expert est circonscrite rigoureusement dans le cadre d’une ou des opérations de gestion précisément dénoncées.

Le Tribunal de première instance constate qu’en l’espèce, en saisissant le juge des référés par exploit du 24 octobre 2011, Monsieur N. a dénoncé l’absence de reddition des comptes de la société par le gérant statutaire, Madame M. 

Faisant droit à cette demande, le juge des référés, dans son ordonnance n°388 du 29 décembre 2011, a ordonné un audit de gestion de la société C. de sa création au 31 décembre 2010.

Le Tribunal observe toutefois qu’il manque, tant à la demande qu’à ladite décision, la détermination rigoureuse des actes de gestion incriminés, de sorte que les dispositions de l’Acte uniforme sont inapplicables en l’espèce.

Les moyens de Monsieur N. sont donc injustifiés.

Par conséquent, il y a lieu de rejeter sa demande en annulation de l’ordonnance n°557/12 du 10 
octobre 2012.

Sur le montant des honoraires de l’expert

Le Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou rappelle tout d’abord que l’expert a accompli la mission qui lui a été assignée par le juge des référés suivant ordonnance n°388 du 29 décembre 2011. 

Le tribunal de première instance précise à cet égard que le rapport de l’ensemble des opérations a été déposé au greffe du tribunal de première instance de céans.

Le tribunal rappelle ensuite que par ordonnance n°557/12 du 10 octobre 2012, les honoraires de l’expert ont été fixés à la somme de 13.600.000 FCFA.

Il estime toutefois qu’à l’analyse de la consistance des travaux de l’expert, cette somme mérite d’être révisée à la baisse. 

Par conséquent, il y a lieu de fixer les honoraires de l’expert à six millions de francs.

Bon à savoir

Conformément à l’article 159 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique, un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander à la juridiction compétente du siège social statuant à bref délai, la désignation d’un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion3

Aucune autre condition que celle relative à la proportion de représentation dans le capital social n’est requise pour les associés désirant demander une expertise de gestion4.

La demande d’expertise de gestion doit porter sur une ou plusieurs opérations de gestion déterminées.

Pour être déclaré recevable, la demande d’expertise de gestion doit avoir un caractère sérieux.

Si la juridiction compétente saisie fait droit à la demande d’expertise de gestion, celle-ci détermine l’étendue de la mission du ou des experts nommés et leurs pouvoirs5.

En vertu de l’article 160 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique, la rémunération de l’expert est supportée par la société et non des associés ayant sollicité l’expertise de gestion6. A cet égard, soulignons que l’associé qui conteste les frais d’une expertise de gestion fixés par l’ordonnance présidentielle peut exercer un recours devant le juge compétent qui, après évaluation du travail effectué par l’expert, peut conclure à la réduction de ces frais7.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

______________

1. Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou, Ordonnance n °374 du 25 septembre 2013, Nkeuna Olivier c/ Tene Job et autres, Ohadata J-14-120, www.ohada.com

2. ATCAM du 25 novembre 1952 portant fixation du taux des frais de justice en matière de fraudes commerciales, médecine légale, toxicologie, biologie et radiodiagnostic

3. Article 159 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

4. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique [OHADA], Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 448.

5. Ibid., p. 451.

6. Article 160 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

7. Tribunal de première instance de Yaoundé-Ekounou, Ordonnance n °374 du 25 septembre 2013, Nkeuna Olivier c/ Tene Job et autres, Ohadata J-14-120, www.ohada.com