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DROIT DES SOCIETES

DROIT DES SOCIETES ABREGES JURIDIQUES

25 Octobre 2016

Tribunal régional hors classe de Dakar - Article 159 AUSCGIE (Révisé)

Présentation des faits1

Suivant l’exploit d’huissier en date du 14 avril 1999, Monsieur H. a assigné la société N., Monsieur I., Madame S., Monsieur M., Monsieur K., Monsieur S. et Madame N., devant le juge des référés pour entendre désigner un expert comptable et financier avec pour mission de faire un audit de la société N., de déterminer la valeur actuelle des actions et le montant réel des bénéfices dégagés depuis la création de la société. 

La société N. et autres ont conclu à l’incompétence du juge des référés, au motif que la présente procédure n’a aucun caractère d’urgence ni de péril. Ils estiment que la date de l’assignation et celle des conclusions de Monsieur H. ainsi que les différents renvois permettent de considérer que l’urgence et le péril invoqué n’existent pas, d’autant plus que Monsieur H. s’est limité à invoqué l’urgence dans l’acte d’assignation, mais n’a pas conclut sur ce point.

Décision du Tribunal régional hors classe de Dakar

Le Tribunal régional hors clase de Dakar rappelle tout d’abord que l’urgence est une question de fait, qui relève de l’appréciation souveraine du juge.

Le tribunal régional observe qu’en l’espèce, la mésentente ou l’existence d’un différend n’a pas d’influence sur la bonne marche de la Société N., compte tenu de la répartition des actions et de la non-implication de Monsieur H. dans la gestion de ladite société. 

Il souligne ensuite qu’en dehors de l’urgence et de l’article 159 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique, qui exige que l’associé qui sollicite l’expertise de gestion représente au moins le cinquième du capital social, il n’y a pas un texte particulier qui donne compétence au juge des référés pour statuer sur les mesures sollicitées par Monsieur H.

Il résulte des éléments de la procédure que la valeur de l’action de la Société N. a été évaluée aussi bien par l’expert de cette société que par un expert commis par Monsieur H. et que Monsieur H. était informé des résultats de la société N.

Au vu de ce qui précède, le Tribunal régional hors classe de Dakar considère qu’il y a lieu de se déclarer incompétent pour défaut d’urgence.

Bon à savoir

Si les associés d’une société commerciale, peu importe sa forme, ne s’estiment pas suffisamment éclairés quant à la situation de la société « en dépit des rapports de gestion, des comptes sociaux et, le cas échéant, des rapports des commissaires aux comptes ou des questions qu’ils peuvent poser2 », ils peuvent solliciter une expertise de gestion3.

En effet, conformément à l’article 159 de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique, un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander à la juridiction compétente du siège social statuant à bref délai, la désignation d’un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion.

Aucune autre condition que celle relative à la proportion de représentation dans le capital social n’est requise pour les associés désirant demander une expertise de gestion4.

La demande d’expertise de gestion doit porter sur une ou plusieurs opérations de gestion déterminées5.

La notion d’opération de gestion ne fait l’objet d’aucune définition légale6. Toutefois, il est certain que l’expertise de gestion ne peut être ordonnée, si elle vise à examiner l’ensemble des activités de la société durant une longue période7.

Quant aux organes de gestion, rien ne paraît limiter ce terme aux seuls dirigeants de la société8.

Pour être déclaré recevable, la demande d’expertise de gestion doit avoir un caractère sérieux. Elle peut notamment se fonder sur une présomption d’irrégularité d’une ou de plusieurs opérations de gestion ou s’envisager en raison d’un risque d’atteinte à l’intérêt social9

Bien que l’Acte uniforme révisé a supprimé la mention selon laquelle la demande devait être faite au président de la juridiction compétente du siège social de la société, la demande d’expertise se fera le plus souvent devant le président du tribunal, par voie au référé, au motif de la mise en péril des intérêts de la société ou d’un ou de plusieurs associés. L’urgence devra dans ce cas être justifiée10.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

________________

1. Tribunal régional hors classe de Dakar, ordonnance de référé n°901 du 9 août 1999, Hassane Yacine c/ Société Nattes Industries, Ibrahima Yazback et autres, Ohadata J-02-198, www.ohada.com

2. Articles 157 et 158 de l’Acte uniforme (révisé) relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

3. Articles 159 et 160 de l’Acte uniforme (révisé) relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

4. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique [OHADA], Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 448.

5. J. ISSA-SAYEGH, « Observations », obs. sous Tribunal régional hors classe de Dakar, ordonnance de référé n°901 du 9 août 1999, Hassane Yacine c/ Société Nattes Industries, Ibrahima Yazback et autres, Ohadata J-02-198, www.ohada.com

6. A. FOKO, « L’essor de l’expertise de gestion dans l’Espace Ohada », Penant, n°867, avril-juin 2009, pp. 193-194.

7. CCJA, arrêt n°027/2013 du 18 avril 2013, Hann c/ SGBG, Juridata, J027-04/2013.

8. A. FOKO, « L’essor de l’expertise de gestion dans l’Espace Ohada », Penant, n°867, avril-juin 2009, pp. 189-192.

9. A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique [OHADA], Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), LGDJ, 2015, p. 450.

10. Tribunal régional hors classe de Dakar, ordonnance de référé n°901 du 9 août 1999, Hassane Yacine c/ Société Nattes Industries, Ibrahima Yazback et autres, Ohadata J-02-198,www.ohada.com ; Cour d’appel de Cotonou, arrêt n°256/2000 du 17 août 2000, affaire CPI, M. Séfou Fagbohoun, Sonacop, M. Cyr Koty C/ Etat Béninois.