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DROIT COMMERCIAL

Abrégés juridiques

8 Mai 2015

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L'interprétation de la volonté des parties dans le contrat de vente commerciale

L interpretation de la volonte des parties dans le contrat de vente commerciale

La vente commerciale peut être définie comme le contrat par lequel un vendeur professionnel s'engage envers un acheteur professionnel à lui transférer des marchandises moyennant le paiement du prix 1.

A cet égard, l'article 238 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général indique que le contrat de vente commerciale doit être interprété conformément à la volonté des parties. Le rôle du juge consiste donc à rechercher quelle a été la commune intention des parties lorsqu'elles ont rédigé le contrat 2.

Le pouvoir du juge de déterminer la volonté des parties est cependant encadré par l'Acte uniforme qui détermine les directives à suivre en matière d'interprétation des contrats de vente commerciale.

Il découle du principe de l'autonomie de la volonté, qu'en principe, les parties ne sont liées que par ce qu'elles ont réellement voulu 3. Par conséquent, les clauses du contrat de vente commerciale doivent, en premier lieu, être interprétées selon la volonté interne des parties.

En outre, le juge doit tenir compte de l'exigence de bonne foi prévue à l'article 237 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général 4, laquelle peut être définie comme la fidélité aux engagements ou la sincérité dans les paroles 5. Elle implique donc de se comporter en homme honnête et consciencieux 6. Par conséquent, il en résulte qu'une fois la parole d'une des parties mise à jour par le juge, celui-ci ne peut qu'en faire application, et imposer aux parties le respect de cette parole.

Le législateur OHADA tempère toutefois cette première règle d'interprétation puisqu'il prévoit que lorsqu'une clause est ambiguë 7, la volonté d'une partie doit être interprétée selon le sens qu'une personne raisonnable, de même qualité que l'autre partie, placée dans la même situation, aurait déduit de son comportement 8.

Précisons que par personne raisonnable, il y a lieu d'entendre le bon père de famille ou le commerçant honnête, doté d'une capacité moyenne et bon gérant 9.

En pratique, l'ambiguïté d'une clause contractuelle résulte le plus souvent d'un malentendu ou d'une maladresse dans la rédaction de la clause, d'une discordance entre deux clauses du contrat de vente ou d'une omission dans le contrat. En effet, lorsqu'une clause du contrat de vente interdit à un confectionneur de costumes masculins de vendre des pantalons d'homme, faut-il interpréter cette clause comme lui interdisant également de vendre des pantalons d'homme à un clientèle féminine ou uniquement à une clientèle masculine ?

Afin de répondre à ce type de question, le juge devra donc combiner l'interprétation subjective et l'interprétation objective de la volonté des parties.

En effet, la recherche de la volonté interne des parties devra être complétée par une recherche basée sur une appréciation in abstracto afin de déterminer de manière objective la volonté des parties au contrat de vente 10.

Cette règle d'interprétation s'explique par le fait que le juge doit non seulement déterminer l'intention véritable d'une partie par rapport à sa volonté interne mais également œuvrer de manière à élaborer une solution juridique appropriée compte tenu des besoins et intérêts à protéger 11. Ce pouvoir d'interprétation ne lui permet toutefois pas de compléter la volonté d'une des parties d'après ses opinons personnelles, ni d'être guidé par ses sympathies, ses goûts ou points de vue subjectifs 12.

Par ailleurs, l'Acte uniforme dispose que, pour déterminer la volonté d'une partie, il y a lieu également de tenir compte des circonstances de fait, et notamment des négociations qui ont pu avoir lieu entre les parties, des pratiques qui se sont établies entre elles, voire des usages en vigueur dans la profession concernée 13.

La phase précontractuelle est celle qui précède le contrat et au cours de laquelle les futurs contractants préparent le contrat. Le juge peut donc puiser, dans les documents échangés lors de cette phase, les éléments susceptibles de l'aider à interpréter le sens d'une clause contractuelle. Il doit également déceler dans les négociations survenues entre les parties, les circonstances particulières de nature à faire présumer que les parties ont entendu donner un autre sens que celui dont se prévaut l'une des parties.

Le juge devra également tenir compte des pratiques qui se sont établies entre les parties et aux usages en vigueur dans la profession concernée. Cette idée trouve sa suite dans l'article 239 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial qui prévoit que les parties sont liées par les usages auxquels elles ont consenti et par les pratiques qui se sont établies dans leurs relations commerciales. Sauf convention contraire des parties, elles sont réputées avoir adhéré aux usages professionnels dont elles avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance et qui, dans le commerce, sont largement connus et régulièrement observés par les parties à des contrats de même nature dans la branche d'activité concernée 14.

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1. G. Ghestin et et B. Desche, La vente, L.G.D.J., 1990, p. 1.

2. G. Marty et P. Raynaud, Droit civil, obligations, t. II, 1er volume, Sirey, 1962, p. 197.

3. A. Benabent, Droit civil. Les obligations, 5ème éd. Montchrestien, p. 152.

4. Article 237 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

5. Volansky,  Essai d'une définition expressive du droit basée sur l'idée de bonne foi, Paris, 1929, n°76.

6. M. Planiol et G. Ribert, Traité pratique de droit civil français, T. IV, n°379.

7.Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA), Arrêt du 22 décembre 2005, Arrêt n° 064/2005, Affaire : SANY Quincaillerie (c/ SUBSAHARA SERVICES NC, Recueil de jurisprudence de la CCJA, n° 6, juin-décembre 2005, p. 54.

8. Article 238 alinéa 1er de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

9. A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 366.

10. A.S. Adjita, « L'interprétation de la volonté des parties dans la vente commerciale Ohada », Penant n° 841, 2002, p. 473.

11. J. Ghestin, Les effets du contrat, L.G.D.J., 2001, p. 10.

12. F. Zoll, « Méthode d'interprétation en droit privé positif », in  Recueil d'Etudes sur les sources du droit, Librairie du Recueil Sirey, p. 438.

13. Article 238 alinéa 2 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

14. Article 239 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.