Toggle Menu
#agissons #agissons

DROIT COMMERCIAL

LES INTERMEDIAIRES DE COMMERCE

25 Octobre 2016

Cour Commune de Justice et d'Arbitrage - Article 144 AUDCG - Article 176 AUDCG révisé

Présentation des faits1

La Société G. a livré des marchandises à la Société N. La Société N. considère que la Société G. a agi comme agent commercial au nom et pour le compte de la Société M. et estime qu’elle doit payer à la Société M., et non à la Société N.

Par une ordonnance d’injonction de payer datant du 24 juin 1999, la Société N. a été condamnée à payer à la Société G. la somme de 99.960.265 francs.

Le 05 juillet 1999, la Société N. a formé opposition à l’exécution de cette ordonnance.

Le Tribunal de première instance d’Abidjan, dans son jugement rendu le 14 février 2000, a rétracté l’ordonnance en cause.

La Société G. a ensuite interjeté appel de ce jugement. La Cour d’appel d’Abidjan, dans son arrêt du 17 novembre 2000, a infirmé le jugement rendu le 14 février 2000 et restitué l’ordonnance d’injonction de payer.

Le 24 janvier 2001, la Société N. a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel d’Abidjan.

La Société N. invoque deux moyens à l’appui de son pourvoi. Tout d’abord, elle reproche à l’arrêt attaqué « un défaut de base légale résultant de l’absence, de l’insuffisance, de l’obscurité ou de la contrariété des motifs » dès lors que la Cour d’appel a infirmé le jugement rendu par le Tribunal de première instance et a restitué l’ordonnance d’injonction de payer au motif que la créance dont le recouvrement est poursuivi est fondée. La Société N. considère que c’est à tort que la Cour d’appel a estimé que la livraison de la marchandise avait bien été réalisée par la Société G. et qu’il n’était pas établi que cette société agissait comme agent de la Société M.

Selon la Société N. ni la livraison d’une marchandise ni l’établissement d’une facture ne sont des éléments suffisants pour justifier l’existence d’une créance. La Société considère également que, dans les relations commerciales, une multitude de situations existent dans lesquelles des livraisons de marchandises sont effectuées par des agents économiques, sans qu’il n’y ait naissance d’une créance au profit du livreur.

Ensuite, la Société N. reproche, dans son deuxième moyen, à la Cour d’appel d’Abidjan d’avoir violé l’article 144 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général2 en décidant qu’il n’était pas apporté la preuve que la Société G. agissait pour le compte de la Société M. La Société N. reproche à la Cour d’appel d’avoir mal appliqué ou interprété l’article 144 de l’Acte uniforme précité, duquel il ressort que le mandat d’intermédiaire « peut être prouvé par tous moyens… ». Elle reproche également à la Cour d’appel d’avoir « totalement ignoré » les documents qu’elle a présentés.

Décision de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage

A propos du premier moyen invoqué par la Société N., la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) considère que la Cour d’appel d’Abidjan a examiné et déterminé la valeur probante de toutes les pièces qui ont été produites par les parties à l’appui de leurs prétentions.

La CCJA considère en l’espèce que c’est seulement après avoir examiné toutes ces pièces que la Cour d’appel d’Abidjan a estimé qu’il résultait des factures et des bordereaux de livraison que c’est bien la Société G. qui a livré la marchandise à la Société N.

La Société N. n’ayant pas pu rapporter la preuve que la Société G. agissait en réalité pour le compte de la Société M., la Société N. pouvait uniquement se libérer entre les mains de la Société G.

La CCJA conclut dès lors que le moyen de la Société N. n’est pas fondé et que la Cour d’appel a souverainement apprécié les faits et suffisamment motivé sa décision.

Concernant le deuxième moyen, la CCJA commence par constater que la Cour d’appel n’a en l’espèce pas « totalement ignoré » les documents produits par la Société N. L’arrêt attaqué fait en effet expressément mention de ces documents.

Il est toutefois vrai que la Cour d’appel n’a pas attaché à ces documents la force probante que la Société N. aurait voulu y voir attacher.

La CCJA conclut également que ce moyen n’est pas fondé. La Cour d’appel, en analysant les documents présentés devant elle et en en déduisant que la Société N. n’a pas rapporté la preuve que la Société G. agissait pour le compte de la Société M., n’a pas violé l’article 144 de l’Acte uniforme précité.

Bon à savoir

L’intermédiaire de commerce est la personne physique ou morale qui a le pouvoir d’agir, ou entend agir, habituellement et professionnellement pour le compte d’une autre personne, commerçante ou non, afin de conclure avec un tiers un acte juridique à caractère commercial3.

L’Acte uniforme réglemente spécifiquement trois catégories d’intermédiaires de commerce, à savoir le courtier, l’agent commercial et le commissionnaire.

Quant à l’agent commercial, il s’agit d’un mandataire professionnel chargé de façon permanente de négocier et, éventuellement, de conclure des contrats de vente, d'achat, de location ou de prestation de services, au nom et pour le compte de producteurs, d'industriels, de commerçants, ou d'autres agents commerciaux, sans être lié envers eux par un contrat de travail4.

Afin de distinguer l’agent commercial des autres intermédiaires de commerce, il convient d’identifier deux éléments. Tout d’abord, l’agent commercial est le seul intermédiaire de commerce auquel un véritable mandat est conféré. Ensuite, sa mission est de négocier des contrats au nom et pour le compte du mandant. Ce dernier ne sera toutefois engagé que s’il accepte ensuite le contrat. 

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

____________________

 

1. Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, arrêt n°10/2002 du 21 mars 2002, www.ohada.com, Ohada J-02-72.

2. Il s’agit désormais de l’article 176 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

3. Article 169 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

4. Article 216 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.