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Actualités du droit belge

DROIT COMMERCIAL

Le fonds de commerce

12 Mai 2015

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Le fonds de commerce en droit OHADA

La cession du fonds de commerce

L'article 147 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général prévoit que la cession du fonds de commerce obéit aux règles générales de la vente, sous réserve des dispositions particulières prévues dans l'Acte uniforme et des textes spécifiques à l'exercice de certaines activités commerciales 33.

Les règles relatives à la cession du fonds de commerce visent un triple objectif : protéger les créanciers du vendeur contre les ventes clandestines, garantir le vendeur contre la faillite de l'acquéreur puisque la vente est souvent faite à crédit, et enfin, protéger l'acquéreur par la mention dans l'acte de vente des renseignements destinés à l'éclairer sur la consistance et la valeur du fonds 34.

En ce qui concerne les conditions de fond de la cession du fonds de commerce, le législateur OHADA dispose que l'acquéreur du fonds doit avoir la capacité d'exercer le commerce puisque par la cession du fonds, il devient commerçant 35. En outre, la cession étant un contrat de vente, le consentement des parties doit être exempt de vice et porté sur la chose et le prix 36.

S'agissant de l'objet de la cession du fonds de commerce, celle-ci doit nécessairement porter sur les éléments énumérés à l'article 136 de l'Acte, c'est-à-dire la clientèle, le nom commercial et l'enseigne 37. Le propriétaire a cependant la possibilité d'inclure dans la vente d'autres éléments corporels ou incorporels 38.

Par ailleurs, l'article 150 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général énumère la liste des mentions devant obligatoirement figurer dans le contrat de cession 39. Il s'agit notamment du prix, des activités du vendeur et de l'acheteur, de l'état des privilèges, nantissements et inscriptions grevant le fonds, du chiffre d'affaires réalisé au cours de chacune des trois dernières années d'exploitation, des résultats commerciaux réalisés pendant la même période, etc… 40

L'omission ou l'inexactitude de ces mentions obligatoires est sanctionnée de nullité relative 41. Seul l'acquéreur peut donc demander la nullité de la cession 42. En outre, il doit démontrer que cette omission ou cette inexactitude a substantiellement affecté la consistance du fonds cédé et qu'il en subit un préjudice 43.

Afin d'informer et de protéger les créanciers du vendeur qui cède son fonds de commerce, l'Acte uniforme relatif au droit commercial général impose, en outre, deux mesures de publicité de la cession du fonds de commerce. Premièrement, l'acte de cession doit être déposé en une copie certifiée conforme par le vendeur ou l'acquéreur au Registre du commerce et du crédit mobilier. Cette mesure est essentielle puisque son accomplissement rend opposable la cession du fonds de commerce aux tiers 44. Deuxièmement, l'acquéreur doit, dans un délai de quinze jours à compter de la date de l'acte de cession faire publier celui-ci sous forme d'avis, dans un journal habilité à publier des annonces légales et paraissant dans le lieu où le vendeur est inscrit au registre du commerce et du crédit mobilier 45.

Entre parties, la cession du fonds de commerce a les mêmes effets qu'une vente 46. Le vendeur est donc tenu à deux obligations principales envers l'acquéreur : une obligation de délivrance et une obligation de garantie.

L'obligation de délivrance implique que le vendeur est tenu de mettre l'acquéreur en possession des éléments cédés à la date prévue dans l'acte de vente. En pratique, cette mise en possession se réalise par la remise des clés des locaux où est situé le fonds. Cependant, si le paiement du prix a été prévu au comptant, le vendeur n'est pas, sauf convention contraire entre les parties, de mettre l'acheteur en possession qu'à la date du complet paiement.

Le vendeur doit, par ailleurs, faciliter la prise de possession de la clientèle en fournissant à l'acheteur les renseignements et documents utiles sur les clients 47.

En ce qui concerne l'obligation de garantie, outre la garantie des vices cachés 48 et la garantie contre les évictions émanant d'un tiers, le vendeur doit garantir l'acquéreur de son fait personnel, ce qui fait peser sur lui une obligation de non-rétablissement ou de non-concurrence 49.

L'acheteur a, quant à lui, l'obligation de prendre livraison du fonds vendu. A défaut, le vendeur est en droit, soit de le contraindre à une exécution forcée, soit de demander la résolution de la vente 50. En outre, il est tenu de payer le prix, aux jour et lieu fixés dans l'acte de vente, entre les mains du notaire ou de tout établissement bancaire désigné comme séquestre d'un commun accord entre les parties à l'acte. Cette mesure a pour but de protéger les créanciers du vendeur et d'éviter que le prix de la vente ne leur soit dissimulé 51 puisque le séquestre conservera cette somme pendant un délai de trente jours à compter de la parution de l'avis de cession. Si au terme de ce délai, aucune opposition à la cession n'a été notifiée par les créanciers du vendeur, le séquestre remettra le prix de vente au vendeur.

Enfin, le prix de vente étant, en pratique, rarement payé au comptant, l'Acte uniforme relatif au droit commercial général a voulu protéger le vendeur du fonds en lui octroyant un privilège sur le fonds vendu. Ce privilège doit être inscrit au Registre du commerce et du crédit mobilier et permet au vendeur, dans le cas où le fonds serait revendu par l'acquéreur, de se faire payer par préférence sur le prix de revente 52. Par ailleurs, le privilège accordé au vendeur lui permet de s'opposer à certains actes accomplis par l'acquéreur et susceptibles de faire baisser la valeur du fonds et donc de diminuer sa garantie.

__________________________

33. Article 147 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

34. A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 219.

35. B. Y. Meuke, « Réussir la reprise du fonds de commerce dans l'espace OHADA », Jurifis Info, n° Décembre 2010, p. 22.

36. Voy. Répertoire de droit commercial, V° Fonds de commerce, n°244.

37. Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, Jugement du 12 décembre 2001, Jugement n° 984, OK-RAIDS c/ LATIL, www/ohada.com, J-04-03 ; Article 148 de l'Acte uniforme en droit commercial général.

38. P. Fieni, « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et du nouvel Acte uniforme », Actualités Juridiques, Edition économique n° 3 / 2012, p. 22.

39. Voy. S. Kuate Tameghe, « Hypothèses sur le dol de la cession du fonds de commerce : réflexions à partir du droit issu du Traité OHADA », site d'information www.ohada.com, p. 3 et suiv.

40. Article 150 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

41. Cour d'Appel de Bobo-Dioulasso, Arrêt du 14 mai 2003, Arrêt n° 68, Société E. c/ Société S, www.ohada.com, J-07-209.

42. Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt du 22 juillet 2005, Arrêt n° 820, Affaire : M. WAFO DZUMGNG RAOUL c/ Mme SYLLA AWA, www.ohada.com, J-09-209.

43. S. Kuate Tameghe, « Hypothèses sur le dol de la cession du fonds de commerce : réflexions à partir du droit issu du Traité OHADA », site d'information www.ohada.com, p. 3.

44. Tribunal de Grande Instance de Bobo-Dioulasso, Jugement du 30 avril 2003, Jugement n° 153/03, Affaire : ECODIS c/ SANAMKOOM INTERNATIONAL (SKI), www.ohada.com, J-09-93.

45. Article 152 et 153 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

46. B. Y. Meuke, « Réussir la reprise du fonds de commerce dans l'espace OHADA », Jurifis Info, n° Décembre 2010, p. 22.

47. A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 224.

48. P. Fieni, « Droit commercial général dans l'espace OHADA : étude comparative de l'ancien et du nouvel Acte uniforme », Actualités Juridiques, Edition économique n° 3 / 2012, p. 22.

49. Article 155 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

50. Voy. Répertoire de droit commercial, V° Fonds de commerce, n°424.

51.  B. Y. Meuke, « Réussir la reprise du fonds de commerce dans l'espace OHADA », Jurifis Info, n° Décembre 2010, p. 22.

52. Article 166 et suivants de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés.