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DROIT COMMERCIAL

Le statut du commerçant

3 Février 2015

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Le statut du commerçant en droit OHADA

Les empechements a l exercice du commerce

Quand bien même une personne se voit reconnaître la capacité juridique de faire le commerce, certains empêchements à l'exercice de l'activité commerciale peuvent exister.

On distingue d'une part les incompatibilités, qui ont pour effet de restreindre l'accès au commerce, et d'autre part, les interdictions ou déchéances, lesquelles interviennent à titre de sanction afin d'écarter certains individus de la profession de commerçant.

Les incompatibilités sont les interdictions faites à une personne exerçant une fonction déterminée d'en exercer une autre. L'article 8 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général dispose que « nul ne peut exercer une activité commerciale lorsqu'il est soumis à un statut particulier établissant une incompatibilité » 57. Cet article renvoie donc aux règles de droit national qui érigeraient certaines incompatibilités 58.

L'article 9 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général donne une liste indicative des fonctions incompatibles avec l'exercice de la profession de commerçant. L'idée sous-jacente est que l'esprit de spéculation qui caractérise l'activité commerciale est inconciliable avec l'honneur et la dignité de certaines fonctions ou responsabilités 59. Les professions considérées comme incompatibles avec la profession de commerçant sont :

- les fonctionnaires et personnels des collectivités publiques et des entreprises à participation publique ;

- les officiers ministériels et auxiliaires de justice : avocat, huissier, commissaire-priseur, agent de change, notaire, greffier, administrateur et liquidateur judiciaire ;

- les experts-comptables agréés et comptables agréés, commissaires aux comptes et aux apports, conseils juridiques, courtiers maritimes ;

- et plus généralement, toute profession dont l'exercice fait l'objet d'une réglementation interdisant le cumul de cette activité avec l'exercice d'une profession commerciale 60.

La violation de ces incompatibilités n'entache néanmoins pas la validité des actes accomplis à l'égard des tiers de bonne foi. En effet, ceux-ci peuvent, si bon leur semble, se prévaloir des actes accomplis par une personne en situation d'incompatibilité. A contrario, cette dernière ne peut s'en prévaloir 61. La personne frappée d'incompatibilité se voit donc reconnaitre la qualité de commerçant mais uniquement sous l'angle des obligations qui s'imposent à elle et non pas du point de vue des avantages. Une sanction d'ordre disciplinaire peut également être appliquée, de même que des sanctions pénales 62.

Contrairement aux incompatibilités, les déchéances sont des interdictions qui interviennent a posteriori pour sanctionner le commerçant qui a fait preuve d'indignité ou d'incompétence. L'article 10 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général énumère 3 séries de cas dans lesquels le commerçant est déchu du droit de faire commerce.

Premièrement, il s'agit des personnes qui ont fait l'objet d'une interdiction générale, définitive ou temporaire, prononcée par une juridiction de l'un des États-parties au Traité OHADA, que cette interdiction ait été prononcée comme peine principale ou comme peine complémentaire 63. Certaines de ces interdictions judiciaires sont de droit. Tel est le cas de la faillite personnel du commerçant qui entraîne de plein droit l'interdiction générale de faire le commerce pendant une durée comprise entre trois à dix ans.

Par ailleurs, les individus ayant fait l'objet d'une condamnation définitive à une peine privative de liberté pour crime de droit commun, ou à une peine d'au moins trois mois d'emprisonnement non assortie de sursis pour un délit contre les biens, ou une infraction en matière économique et financière sont également déchus de droit d'accomplir des actes de commerce 64. Le législateur a en effet estimé que dans l'intérêt du commerce, il est préférable que les auteurs de ces crimes et délits soient écartés des professions commerciales. L'interdiction prend cours à compter du prononcé de la décision définitive de condamnation 65.

Pour finir, l'article 10 alinéa 3 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général prévoit que la personne qui fait l'objet d'une interdiction prononcée par une juridiction professionnelle ne peut plus exercer une activité commerciale. Dans ce cas, l'interdiction ne s'applique qu'à l'activité commerciale considérée puisqu'une interdiction générale d'exercer le commerce ne peut être prise que par un juge de l'ordre judiciaire 66.

L'interdiction à titre temporaire d'une durée supérieure à 5 ans ainsi que l'interdiction à titre définitif peuvent être levées à la requête de l'interdit par la juridiction qui a prononcé l'interdiction. La requête ne sera cependant recevable qu'à condition qu'un délai de cinq ans se soit écoulé à compter du jour du prononcé de l'interdiction 67.

Pour le commerçant frappé de faillite, l'interdiction prend fin par la réhabilitation dans les conditions et les formes prévues par l'Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

Les sanctions en cas de non-respect des interdictions prévues à l'article 10 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial sont énoncées à l'article 12 de ce même acte. Il s'agit, d'une part, de l'inopposabilité aux tiers de bonne foi des actes accomplis en violation de la déchéance et, d'autre part, de l'opposabilité de ces actes à l'interdit lui-même 68. Puisque la bonne foi est toujours présumée, il appartient à celui qui invoque l'irrégularité de l'acte passé de démontrer que le tiers avait connaissance de l'irrégularité au moment de la conclusion de l'acte 69.

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57. Article 8 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

58. J. Issa-Sayegh, « Présentation des dispositions sur le droit commercial général », www.ohada.com, p.2.

59. A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 97.

60. Article 9 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

61. Ibidem.

62. B. Traore, « Présentation synthétique du statut du commerçant et des auxiliaires de commerce dans l'acte uniforme de l'Ohada portant droit commercial général », Actualités juridiques, n° 35/2003, p.8.

63. Article 10 al. 2 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

64. Article 10 al. 4 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

65. S. Kuaté Tameghé , «Sortie de la cour du roi Pétaud : à propos de l'interdiction d'exercer la profession commerciale dans l'Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général », R.D.I.D.C., 2006/2, p. 121.

66. B. Bia, « La qualité de commerçant en droit congolais et en droit issu de l'OHADA », www.ohada.com, p. 12.

67. Article 11 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

68. Article 12 de l'Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

69. S. Kuaté Tameghé , «Sortie de la cour du roi Pétaud : à propos de l'interdiction d'exercer la profession commerciale dans l'Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général », R.D.I.D.C., 2006/2, p.127.