
Le redressement judiciaire et la liquidation des biens
L ouverture du redressement judiciaire et de la liquidation des biens
Contrairement au règlement préventif, le redressement judiciaire et la liquidation des biens est conditionnée par la cession de paiement du débiteur.
Ainsi, le débiteur, qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, doit faire une déclaration de cessation des paiements aux fins d'obtenir l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens, quelle que soit la nature de ses dettes. 13
Cette déclaration, faite par le débiteur, doit avoir lieu dans les trente jours de la cessation des paiements et déposée au greffe de la juridiction compétente contre récépissé. 14
Le débiteur doit annexer à sa déclaration une série de documents, à savoir 15:
- Un extrait d'immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier ;
- Les états financiers de synthèse comprenant, notamment, le bilan, le compte de résultat, un tableau financier des ressources et des emplois ;
- Un état de la trésorerie ;
- L'état chiffré des créances et des dettes avec indication du nom et du domicile des créanciers et des débiteurs ;
- L'état détaillé, actif et passif, des sûretés personnelles et réelles données ou reçues par l'entreprise ou ses dirigeants ;
- L'inventaire des biens du débiteur avec indication des biens mobiliers soumis à revendication par leurs propriétaires et de ceux affectés d'une clause de réserve de propriété ;
- Le nombre des travailleurs ainsi que le montant des salaires et des charges salariales impayés;
- Le montant du chiffre d'affaires et des bénéfices imposés des trois dernières années ;
- Le nom et l'adresse des représentants du personnel ;
- S'il s'agit d'une personne morale, la liste des membres solidairement responsables des dettes de celle-ci avec indication de leurs nom et domicile ainsi que les noms et adresses de ses dirigeants.
L’ensemble de ces documents doivent être datés, signés et certifiés conformes et sincères par le déclarant. 16
Par ailleurs, dans le cas où l'un de ces documents ne peut être fourni, ou ne peut l'être qu'incomplètement, la déclaration doit contenir l'indication des motifs de cet empêchement. 17
En outre, le débiteur doit, en même temps que le dépôt de la déclaration ou, au plus tard, dans les quinze jours qui suivent celle-ci, déposer une offre de concordat précisant les mesures et conditions envisagées pour le redressement de l'entreprise. 18
Dans cette offre de concordat, le débiteur doit notamment reprendre les éléments suivants :
- les modalités de continuation de l'entreprise telles que la demande ou l'octroi de délais et de remises ; la cession partielle d'actif avec indication précise des biens à céder ; la cession ou la location-gérance d'une branche d'activité formant un fonds de commerce ; la cession ou la location-gérance de la totalité de l'entreprise, sans que ces modalités soient limitatives et exclusives les unes des autres ;
- les personnes tenues d'exécuter le concordat et l'ensemble des engagements souscrits par elles et nécessaires au redressement de l'entreprise ; les modalités du maintien et du financement de l'entreprise, du règlement du passif né antérieurement à la décision d'ouverture ainsi que, s'il y a lieu, les garanties fournies pour en assurer l'exécution ; ces engagements et garanties peuvent consister, notamment, en la souscription d'une augmentation du capital social par les anciens associés ou par de nouveaux, l'ouverture de crédits par des établissements bancaires ou financiers, la poursuite de l'exécution de contrats conclus antérieurement à la décision d'ouverture 19, la fourniture de cautions ;
- les licenciements pour motif économique qui doivent intervenir dans les conditions prévues par les articles 110 et 111 du présent Acte uniforme ;
- le remplacement de dirigeants.
Le législateur OHADA a précisé que la procédure collective peut être ouverte sur la demande d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance, pourvue qu'elle soit certaine, liquide et exigible. Cette assignation doit préciser la nature et le montant de sa créance et viser le titre sur lequel elle se fonde. 20
Dans cette hypothèse, le débiteur a la possibilité de faire la déclaration et la proposition de concordat dans le délai d'un mois suivant l'assignation. 21
Il faut noter que l'ouverture d'une procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation des biens ne peut résulter que d'une décision de la juridiction compétente.
Avant la décision d'ouverture d'une procédure collective, le Président de la juridiction compétente peut désigner un juge du siège ou toute personne qu'il estime qualifiée, à charge de dresser et lui remettre un rapport dans un délai qu'il détermine, pour recueillir tous renseignements sur la situation et les agissements du débiteur et la proposition de concordat faite par lui.
En tout état de cause, la juridiction compétente statue à la première audience utile et, elle ne peut rendre sa décision avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de sa saisine, quel que soit le mode de saisine. 22
La juridiction compétente, si elle constate la cessation des paiements, doit prononcer le redressement judiciaire ou la liquidation des biens. 23
Il est important de préciser que la juridiction compétente prononce le redressement judiciaire s'il lui apparaît que le débiteur a proposé un concordat sérieux. Dans le cas contraire, elle prononce la liquidation des biens.
La décision qui constate la cessation des paiements d'une personne morale produit ses effets à l'égard de tous les membres indéfiniment et solidairement responsables du passif de celle-ci et prononce, contre chacun d'eux, soit le redressement judiciaire, soit la liquidation des biens. 24
Cette décision d'ouverture désigne un Juge-commissaire parmi les juges de la juridiction, à l'exclusion de son Président sauf en cas de juge unique. Il désigne le ou les syndics sans que le nombre de ceux-ci puisse excéder trois. 25
Le greffier adresse immédiatement un extrait de la décision au représentant du Ministère Public. Cet extrait mentionne les principales dispositions de la décision.
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13. Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, Jugement du 29/03/2000, JUGEMENT N° 234, REQUÊTE DE LA SO.BU.CI AUX FINS DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE, www.ohada.com, Ohadata J-04-180 ; Article 25 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
14. Ph. ROUSSEL GALLE, « Ouverture des procédures », Revue des procédures collectives n° 4, Juillet 2013, dossier 24.
15. Article 26 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
16. Ph. ROUSSEL GALLE, « Ouverture des procédures », Revue des procédures collectives n° 4, Juillet 2013, dossier 24.
17. YZAS BAKER TILLY, Guide des procédures collectives, Edition Droit-Afrique. Com, 2010, p. 27 et suivantes
18. Article 27 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
19. A. S. ALGADI et L. ELKOUBI, « La résolution de plein droit des contrats en droit OHADA des procédures collectives », Revue congolaise de droit et des affaires, n° 8, 2012, p. 25.
20. Ph. ROUSSEL GALLE et L.C HENRY, « Chronique de droit des entreprises en difficulté. » www.ohada.com, Ohadata D-14-12.
21. Article 28 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ; Cour d'Appel de Lomé, Arrêt du 20/10/2009, ARRÊT N° 150/2009, SIEUR JEAN SAMVI K. DE SOUZA C/ LA COMPAGNIE GTA-C2A IARDT, www.ohada.com, Ohadata J-10-222.
22. J. ISSA-SAYEGH, « Présentation des dispositions sur les procédures collectives d'apurement du passif », www.ohada.com, Ohadata D-06-07 ; Article 32 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.
23. Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, Jugement du 24/01/2001, JUGEMENT N° 100 BIS, REQUÊTE DES ETABLISSEMENTS KORGO ET FRÈRES AUX FINS DE REDRESSEMENT JUDICIAIRE, www.ohada.com, Ohadata J-04-182.
24. J. ISSA-SAYEGH, « Présentation des dispositions sur les procédures collectives d'apurement du passif », www.ohada.com, Ohadata D-06-07.
25. Article 35 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif.