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RECOUVREMENT

SAISIE VENTE

25 Octobre 2016

Tribunal de première instance de Bafoussam - Article 141 AUPSRVE

Présentation des faits 1

Monsieur S est propriétaire d’un fonds de commerce qu’il exploite au marché « A » de Bafoussam. Il prétend avoir acquis ledit fonds en date du 12 décembre 1999 de Monsieur F, employé de commerce demeurant à Bafoussam par acte notarié.

En date du 15 septembre 2000, Monsieur F a fait l’objet d’une saisie-vente, motif pris de ce qu’il est redevable envers Madame D de la somme de 1.123.650 F CFA.

Ladite saisie portait sur les biens garnissant ledit comptoir alors même que Monsieur F n’en était plus le propriétaire, mais simplement gérant depuis le 19 décembre 1999, date de la cession.

Ainsi, par exploit du 22 novembre 2000, Monsieur S a fait opposition à la vente des effets saisis suivant procès-verbal de saisie du 1er septembre 2000.

Monsieur S a fait opposition afin que le Tribunal déclare nulle la saisie pratiquée et ordonne la distraction de tous les biens.

Madame D a rétorqué que les mentions de l’acte notarié dont se prévaut Monsieur S laissent croire que cet acte a été passé le 12 décembre 1999. Or, le 12 décembre correspondait à un dimanche, jour férié et que le notaire ne pouvait par conséquent recevoir les signatures dudit acte un pareil jour. De plus, le dernier paragraphe de cet acte comporte une mention intéressante mettant à jour l’intention frauduleuse des frères  F et S lorsqu’il énonce "Et après lecture faite, les parties ont signé avec Maître HAPPI MESSAK, ce dernier notaire, qui authentifie ce jour 14 novembre 2000".

Madame D considère que seule l’authentification d’un acte lui confère la qualité d’acte authentique, fut-il rédigé par un notaire, de sorte que, la cession alléguée a été faite au mépris de la saisie opérée deux mois plus tôt.

Madame D conclut à la nullité de la cession.

Décision du tribunal

Le Tribunal rappelle qu’en vertu de l’article 141 de l’Acte uniforme OHADA, le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien peut demander à la juridiction compétente d’en ordonner la distraction.

En l’espèce, Monsieur S a versé aux débats l’expédition de l’acte de vente du fonds de commerce saisi passé devant notaire à Bafoussam, à son profit par Monsieur F.

Le juge constate que cet acte a tout l’air d’un faux fabriqué pour les besoin de la cause En effet, il ressort in fine :"Fait et passé à Bafoussam en l’étude du notaire soussigné, l’an mil neuf cent quatre vingt dix neuf et le douze décembre- Et après lecture faite, les parties ont signé avec Maître HAPPI MESSAK, ce dernier notaire, qui a authentifié ce jour, 14 novembre 2000".

Dès lors, au moment où la saisie a été pratiquée, à savoir le 15 septembre 2000, Monsieur S et Monsieur F n’étaient qu’au projet de l’acte, ce dernier ne prenant effet qu’à la date de l’authentification, le 14 novembre 2000.

De plus, Monsieur F était présent lors de la saisie et a signé le procès-verbal de saisie sans aucune objection.

Le juge considère qu’il ressort de ce qui précède que l’action de Monsieur S n’obéit pas aux conditions de l’article 141 susvisé, faute d’éléments de fondement de sa propriété.

Le juge dit l’action de Monsieur S non fondée et l’en déboute.

Bon à savoir

Lorsqu’une contestation est soulevée à l’égard d’une saisie-vente pratiquée2, cette contestation doit être portée devant la juridiction du lieu de la saisie. 3

Lesdites contestations peuvent être soulevées soit par le débiteur, soit par un tiers, soit par des autres créanciers.4

Concernant le tiers à la saisie-vente pratiquée, il faut savoir que ces derniers peuvent introduire une procédure en distraction s’ils considèrent que le bien saisi leur appartient.5

A cet égard, l’article 141 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution dispose que :

Le tiers qui se prétend propriétaire d'un bien saisi peut demander à la juridiction compétente d'en ordonner la distraction.

A peine d'irrecevabilité, la demande doit préciser les éléments sur lesquels se fonde le droit de propriété invoqué. Elle est signifiée au créancier saisissant, au saisi et éventuellement au gardien. Le créancier saisissant met en cause les créanciers opposants par lettre recommandée avec avis de réception ou tout moyen laissant trace écrite.

Le débiteur saisi est entendu ou appel.

Autrement dit, la demande du tiers doit, à peine d'irrecevabilité, préciser les éléments sur lesquels se fonde le droit de propriété invoqué.6  Elle est signifiée au créancier saisissant, au saisi et éventuellement au gardien. Le créancier saisissant met en cause les créanciers opposants par lettre recommandée avec avis de réception ou tout moyen laissant trace écrite.7

A défaut de respecter le prescrit de l’article 141 AUPSRVE, l’action sera déclarée irrecevable.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

 

__________________

1. Tribunal de première instance de Bafoussam, jugement du 21 novembre 2001, www.ohada.com, Ohadata J-04-237.

2. Voyez : H. TCHANTCHOU, « Le contentieux de l'exécution et des saisies dans le nouveau droit OHADA », Juris Périodique n° 46, avril - mai - juin 2000, p. 98-105.

3. Article 129 AUPSRVE ;  Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt du 28/03/2003, www.ohada.com, Ohadata J-03-279.

4. A-M. ASSI-ESSO et N. DIOUF, Recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 135 et suivantes.

5. Article 141 AUPSRVE.

6. Cour d'Appel du Littoral, Arrêt du 21/04/2008, ARRÊT N° 77/REF, DAME FEUZEU CÉLESTINE C/ DAME YOUMBI YVETTE, www.ohada.com, Ohadata J-10-272.

7. A-M. ASSI-ESSO et N. DIOUF, Recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 141.