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DROIT DES SOCIETES

SARL

25 Octobre 2016

Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo - Articles 200, 201, 204 et 207 AUSCGIE Révisé

Présentation des faits1

Par acte authentique du 23 mars 1993, reçu par le Notaire Moussinga, Monsieur B. et trois autres personnes ont constitué une société à responsabilité limitée, dénommée CARTEL SARL. 

La CARTEL SARL était à sa création composée de 4 actionnaires : Monsieur G. était détenteur de 550 actions, alors que les trois autres, dont Monsieur B., étaient chacun détenteur de 150 actions.

Si les débuts difficiles de la société ont été supportés par tous, tel n’a plus été plus le cas depuis 2006, exercice à la fin duquel Monsieur G. a été désigné gérant statutaire n’a plus entendu respecter les statuts de la société et la législation communautaire sur les sociétés commerciales. 

De 2006 à ce jour, Monsieur G. n’a plus jamais organisé un conseil d’administration régulier, encore moins redistribué les dividendes dus aux actionnaires pendant les six exercices dont cinq à ce jour écoulés et clôturés.

De même, Monsieur G. n’a toujours pas cru devoir convoquer une assemblée générale annuelle pour rendre compte de sa gestion et des perspectives de la société aux actionnaires.

Ce faisant, Monsieur G. a installé une mésintelligence suffisante entre associés de la société CARTEL SARL constitutive de justes motifs et justifiant la dissolution de ladite société.

Par exploit d’huissier du 12 avril 2011, Monsieur B. a assigné la société CARTEL et autres, devant le Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo en vue d’ordonner sa dissolution et corrélativement sa mise en liquidation.

Pour faire échec à l’action de Monsieur B., la société CARTEL soutient qu’une assemblée générale s’est tenue le 09 décembre 2009 à l’effet de statuer entre autres sur les comptes et bilans des exercices 2006, 2007 et 2008 dont le procès-verbal a été signé par Monsieur B., devant le notaire.

Une augmentation du capital, en numéraire de 95.000.000 FCFA a été décidée lors l’assemblée du 09 décembre 2009 pour pouvoir supporter et garantir les investissements importants à réaliser. Cette augmentation a été effectuée par tous les associés à l’exception de Monsieur B. qui a refusé d’y participer par mauvaise foi et qui ne dispose au demeurant que de 0,75% du capital social.

Ainsi, pour l’augmentation du capital consentie par la majorité qualifiée requise, la distribution des dividendes entre les associés était devenue impossible suivant accord des associés.

Il apparaît rocambolesque qu’un associé qui dispose d’un pourcentage insignifiant du capital social (0,75%) qu’il n’a d’ailleurs jamais libéré si oui avec l’aide du gérant vienne solliciter la dissolution judiciaire et la liquidation de la société alors que Monsieur B. est promoteur d’une société concurrente, qui est débitrice des défendeurs de la somme en principal de 26.064.655 FCFA depuis plusieurs années.

Décision du Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo

Le tribunal de première instance de Douala-Bonanjo rappelle tout d’abord que la dissolution et la mise en liquidation sollicitées sont prévues respectivement par l’article 200, alinéa 5 et 201, alinéa 1 de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique.

Conformément à l’article 200, alinéa 5 de cet Acte uniforme, « La société prend fin par la dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé ou de mésentente entre associés empêchant le fonctionnement normal de la société... ».

L’article 201, alinéa 1 du même texte dispose que « La dissolution de la société pluripersonnelle entraîne de plein droit sa mise en liquidation ».

L’article 204, alinéa 1 ajoute que « La société est en liquidation dès l’instant de sa dissolution pour quelque cause que ce soit ». 

Il ressort des différents développements et des pièces produites au dossier par les parties qu’en dépit des revendications de Monsieur B., la CARTEL SARL n’est ni en cessation de paiement ni paralysée par ce conflit, qui de toute évidence ne concerne que cette société et un associé. 

Monsieur B. ne disposant à la limite que 15 actions sur 1000 et n’ayant que 0,75% d’actions après l’augmentation querellée du capital, le tribunal de première instance déduit que la mésintelligence alléguée n’est pas de nature à paralyser la société et à justifier sa dissolution comme sollicitée par Monsieur B., bien que de toute évidence la réclamation du paiement et des dividendes cumulés soit légitime et justifiée.

Par conséquent, le tribunal considère qu’il y a lieu de débouter Monsieur B. de sa demande relative à la dissolution et à la liquidation de la CARTEL SARL.

Bon à savoir

La société à responsabilité limitée est soumise aux causes de dissolution communes à toutes les sociétés commerciales2. Ainsi, elle prend fin par dissolution anticipée prononcée par la juridiction compétente, à la demande d’un associé pour justes motifs3, notamment de mésentente entre associés empêchant le fonctionnement de la société4.

Pour que la dissolution soit prononcée, il faut que l’activité économique de la société soit paralysée en raison de la mésentente des associés et que la mésentente ne soit pas imputable à celui qui s’en prévaut en justice5. L’associé minoritaire d’une SARL, qui n’a pas reçu paiement de ses dividendes et n’a pas souscrit à une augmentation de capital, ne peut se fonder sur ces motifs pour obtenir la dissolution anticipée pour justes motifs et la mise en liquidation de la société, en ce qu’ils n’entravent pas le fonctionnement de la société6.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.

________________

1. Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, jugement civil n°714/CIV du 19 juillet 2012, Bamabissassiga Esaïe C/ Cartel Cameroun et autres, Ohadata J-14-48, www.ohada.com

2. D. NDIAW, « Les sociétés de personnes », in Sociétés commerciales et G.I.E., Bruxelles, Bruylant, 2002, p. 397.

3. Article 200, 5° de l’Acte uniforme révisé relatif au droit des sociétés commerciales et au groupement d’intérêt économique.

4. Tribunal régional hors classe de Dakar, Jugement n°089 du 14 mai 2004, JOËL GUY YVES LELIÈVRE c/ SARL S.S.B et S.S.B.M, Ohadata J-05-282, www.ohada.com ; Voy. aussi : Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, Jugement n°631 du 12 juin 2002, KINDA JEAN PASCAL c/ TRUCHET FIRMIN, Ohadata J-04-18, www.ohada.com.

5. Cour d'appel de Bobo-Dioulasso, arrêt n°11 du 25 juin 2008, Korbeogo Barthélemy c/ Ouedraogo R. Fulbert, Ohadata J-12-110, www.ohada.com

6. Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, jugement civil n°714/CIV du 19 juillet 2012, Bamabissassiga Esaïe C/ Cartel Cameroun et autres, Ohadata J-14-48, www.ohada.com