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DROIT COMMERCIAL

LE BAIL COMMERCIAL

25 Octobre 2016

Cour suprême de Côte d'Ivoire - Article 99 AUDCG – Article 131 AUDCG révisé

Présentation des faits1

Dans le courant de l’année 1992, Monsieur B. a donné en location à Monsieur K. un local commercial. Monsieur K. a exploité ce local comme bar-restaurant. Au moment où il a commencé à utiliser le local, Monsieur K. a effectué des travaux pour un montant de 300.000 francs. Il a par ailleurs effectué d’autres travaux plus tard.

Le bien a plus tard changé de propriétaire, et Monsieur E., le nouveau propriétaire, a refusé de percevoir les loyers de Monsieur K. au motif que ce dernier aurait changé la destination des lieux loués. Monsieur E. a également intenté une action en référé en vue d’expulser Monsieur K.,  mais sans succès.

Monsieur K. a à son tour assigné le bailleur devant le Tribunal d’Abidjan afin de recevoir la somme de 15.244.490 francs correspondant au remboursement des frais d’aménagement. Par un jugement rendu le 10 décembre 2001, le Tribunal d’Abidjan a fait droit à la demande de Monsieur K. Toutefois la Cour d’appel d’Abidjan, par un arrêt rendu le 28 février 2003, a infirmé le premier jugement et a débouté Monsieur K. de sa demande.

Monsieur K. a introduit un pourvoi en cassation contre l’arrêt du 28 février 2003. Il reproche en effet à la Cour d’appel d’avoir violé l’article 99 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général (AUDCG)2 en ce qu’elle a sous-entendu que l’autorisation du bailleur serait nécessaire pour le paiement des travaux, mais également que cet accord devrait être donné par écrit.

Décision de la Cour Suprême de Côte d’Ivoire

La Cour Suprême suit l’argumentation de Monsieur K. et considère en effet que selon l’article 99 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, l’autorisation du bailleur est requise afin de pouvoir réaliser les travaux, mais pas pour rembourser les frais.

Par conséquent, la Cour Suprême conclut à la violation par la Cour d’appel d’Abidjan, dans son arrêt du 28 février 2003, de l’article 99 de l’Acte uniforme précité.

La Cour casse et annule l’arrêt attaqué. La Cour décide également d’évoquer l’affaire. Elle se penche ainsi sur la demande de Monsieur K., à savoir la demande de remboursement des frais d’aménagement, soit la somme de 15.244.490 francs.

La Cour commence par constater que les travaux ont été réalisés sans l’accord du bailleur. Toutefois, invoquant l’article 99 alinéa 2, de l’Acte uniforme selon lequel « à défaut d’accord entre les parties, le preneur pourra saisir la juridiction compétente dès l’expiration du bail à durée déterminée non renouvelé…», la Cour rappelle que les travaux d’aménagement et de construction pourront être remboursés.

En l’espèce, les travaux avaient bien été réalisés par Monsieur K. sans réserve de la part du premier bailleur, Monsieur B. Par conséquent, le nouveau bailleur, Monsieur E., ne peut pas prétendre qu’il n’a pas donné son accord dès lors qu’il est tenu par les mêmes termes du contrat que l’ancien bailleur envers le locataire.

Par conséquent, Monsieur K. ne peut pas refuser de payer le montant des travaux. La Cour condamne Monsieur E. à payer à Monsieur L. la somme de 15.244.490 francs.

Bon à savoir

Lorsqu’un bail commercial est conclu, les parties ont plusieurs obligations. Il s’agit en effet d’un contrat synallagmatique.

Le bailleur a trois obligations principales envers le preneur : l’obligation de délivrance du bien3, l’obligation d’entretien du bien4 et l’obligation de garantie contre les troubles de jouissance5.

Le preneur est également tenu au respect de trois obligations envers le bailleur : l’obligation de paiement du loyer6, le bon usage des lieux7 et la conservation des lieux loués.

Concernant les travaux qui auraient été réalisés par le preneur, l’article 131 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général prévoit que le preneur peut en demander le remboursement lorsque lesdits travaux ont été effectués avec l’autorisation du bailleur.

Il est toutefois utile de souligner que l’autorisation du bailleur n’est pas requise pour que le tribunal autorise le remboursement de ces travaux. En vertu de l’article 131 précité, le législateur a en effet uniquement soumis la réalisation des travaux à l’autorisation du bailleur, et non leur paiement8.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.  

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1. Cour Suprême de Côte d’Ivoire, arrêt n°447 du 8 juillet 2004, www.ohada.com, Ohada J-05-354.

2. Il s’agit désormais de l’article 131 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général (AUDCG révisé).

3. Voy. par exemple A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 175 et Article 105 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

4. Article 106 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

5. Voy. par exemple Cour d'Appel de Bobo-Dioulasso, Arrêt du 17 mars 2008, Arrêt n° 29/08, SANOU Issa c/ BARRY Omar, www.ohada.com, J-10-113 ; Article 109 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

6. J. Issa-Sayegh, « Présentation des dispositions sur le droit commercial général », www.ohada.com, p.7.

7. Article 184 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

8. Cour Suprême de Côte d’Ivoire, arrêt n°447 du 8 juillet 2004, www.ohada.com, Ohada J-05-354.