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DROIT COMMERCIAL

LE BAIL COMMERCIAL

25 Octobre 2016

Tribunal de grande instance de Yaounde - Articles 85, 93 et 94 AUDCG – Articles 117, 125 et 126 AUDCG révisé

Présentation des faits1

La Société H. occupe dans l’unique appartenant à la Société S. un local à usage commercial et un autre à usage d’habitation.

Le local commercial fait l’objet d’un bail commercial. Il ressort de ce bail que la surface du local loué est de 1500 mètres carrés et que le loyer mensuel est de 900.000 francs.

La Société S. a envoyé une sommation à la Société H. Cette sommation indique que l’immeuble a été vendu à un tiers non associé à la Société S. Suite à cette vente, le nouveau gérant de l’immeuble souhaite pratiquer une augmentation de loyer en passant de 900.000 à 3.000.000 de francs, soit 2.000 francs par mètre carré.

La Société H. s’oppose à une telle augmentation au motif qu’elle va assigner la Société S. en nullité de la vente.

La Société H. évoque également le fait que la surface du local commercial serait en réalité de 1.094 mètres carrés et non de 1.500 mètres carrés.

La Société H. fait également état du fait que suite à une décision de l’Ambassade des Etats-Unis, elle ne jouit plus des conditions qu’elle possédait auparavant puisque les voies principales permettant d’accéder à son commerce ont été bloquées, ce qui réduit fortement son chiffre d’affaires. Dans ces conditions, elle estime que la révision du loyer ne peut pas uniquement se faire à la hausse. Elle invoque à cet égard l’article 94 de l’Acte uniforme général relatif au droit commercial (AUDCG)2.

La Société H. a assigné la Société S. en justice. Elle demande à ce que la sommation faite de manière unilatérale que le loyer soit augmenté de plus de 300% et donnant congé soit déclarée illégale et tardive.

La Société S. conteste la demande de la Société H. et invoque plusieurs arguments. Premièrement, elle estime que le bail conclu avec la Société H. n’est pas vable puisque, pour le compte de la Société S., il avait été signé par la fille du gérant, qui se trouve également être le directeur de la Société H.

Ensuite, la Société S. indique que les arguments liés à la baisse d’activité de la Société H. n’ont pas d’incidence, d’autant plus que les loyers payés par d’autres locataires du nouvel acquéreur sont fixés à 3.775 francs au mètre carré alors que celui de la Société H. est fixé à 636 francs du mètre carré.

Décision du Tribunal de grande instance de Yaounde

Le Tribunal commence par rappeler le prescrit de l’article 85 de l’Acte uniforme précité3, selon lequel le Tribunal déterminera le montant du nouveau loyer en cas de désaccord entre les parties. Toujours selon le même article, la juridiction compétente tient compte, pour ce faire, des éléments suivants : de la situation des locaux, de leur superficie, de l’état de vétusté et du prix des loyers commerciaux couramment pratiqués dans le voisinage pour des locaux similaires.

Le Tribunal analyse ensuite les montants des divers loyers concernant les baux conclus par la Société S. dans le même immeuble. Se basant sur ces différents montants, le Tribunal conclut que le montant moyen des loyers commerciaux dans cet immeuble est de 3.773 francs au mètre carré.

Par conséquent, le Tribunal acceptant que la surface du local litigieux est de 1094 mètres carrés considère que le montant du nouveau loyer fixé à 3.000.000 de francs par mois est raisonnable.

Le tribunal admet ce nouveau montant de loyer mensuel. Le Tribunal déboute dès lors la Société H. de sa demande et fixe le nouveau montant du loyer à 3.000.000 de francs par mois.

Bon à savoir

L’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général laisse une assez grande liberté aux parties puisqu’il ne soumet le contrat de bail commercial à aucune formalité particulière. Cette liberté concerne notamment la détermination du montant du loyer.

Le loyer peut en effet être fixé librement par les parties, à condition qu’elles respectent les dispositions légales et réglementaires en la matière4.

Le prix peut par ailleurs être révisé en cours de bail. L’acte uniforme précité prévoit à cet égard qu’une révision peut intervenir à l’expiration de chaque triennant, ou selon les conditions prévues par les parties dans le bail5.

Lorsque les parties ne parviennent pas à se mettre d’accord sur le montant du nouveau loyer, la partie la plus diligente peut saisir la juridiction compétente, qui sera alors chargée de fixer le nouveau loyer6. Dans ce cas-là, le juge devra prendre en considération tous les éléments susceptibles d’influencer le montant du loyer, et notamment : la situation des locaux loués, leur superficie, l’état de vétusté et le prix des loyers commerciaux couramment pratiqués dans le voisinage pour des locaux similaires.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.   

________________ 

 

1. Tribunal de grande instance de Yaounde, arrêt n°241 du 21 janvier 2004, www.ohada.com, Ohada J-08-116.

2. Il s’agit désormais de l’article 126 de l’Acte uniforme général portant sur le droit commercial général (AUDCG révisé).

3. Il s’agit désormais de l’article 117 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

4. Article 116 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

5. J. Issa-Sayegh, « Présentation des dispositions sur le droit commercial général », www.ohada.com, p. 7.

6.Cour Commune de Justice et d'arbitrage (CCJA), Arrêt n°36 du 3 juillet 2008, Affaire : Société Burkina et Shell C/0, Le Juris-Ohada, n° 4/2008, p. 30 ; Cour Commune de Justice et d'Arbitrage (CCJA), Arrêt n° 054/2008 du 11 décembre 2008, Pourvoi n° 024/2003/PC du 06/02/2003, Affaire : ROCHE Jean Germain contre Maître TIDOU SANOGO Ladji, Docteur DJOMAN EZAN Angèle, Recueil de Jurisprudence, n° 12, Juillet-Décembre 2008, p. 129.