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DROIT COMMERCIAL

LE BAIL COMMERCIAL

25 Octobre 2016

Tribunal de Première Instance de Dschang - Articles 80, 83 et 101 AUDCG – Articles 112, 115 et 133 AUDCG révisé

Présentation des faits1

Le 12 mars 2003, Madame T. a donné en location à la Société S. un compartiment de son immeuble situé au centre commercial de Dschang.

A la fin du mois de mai 2004, la Société S. a cessé de payer les loyers.

A la fin de l’année 2004, la Société S. a fermé le local et a emporté les clés avec elle.

Un commandement de payer avec menace de résiliation a été envoyé par Madame T. à la Société S. le 07 janvier 2005.

Le 05 janvier 2007, Madame T. a assigné la Société S. en justice.

Suite à une ordonnance rendue le 1er mars 2007 par le Président du Tribunal de première instance de Dschang, Madame T. a pu récupérer la jouissance de son local.

Par ailleurs, tout le mobilier garnissant les lieux a été enlevé par la Société S. le 08 mars 2007. Pour cette raison, Madame T. considère que le bail a pris fin à cette date. Par conséquent, elle demande au Tribunal de condamner la Société S. à lui payer les neuf mois échus et impayés couvrant la période de juin 2004 à mars 2005.

Madame T. demande également à ce que la Société S. soit condamnée à supporter les frais liés à l’Ordonnance précitée d’ouverture forcée des portes, à la manutention et au stockage des effets de la Société S. dans le local. Ces frais s’élèvent à 135.000 francs.

Pour sécuriser les effets de la Société S., Madame T. a en outre dû payer un gardien de mars 2005 à février 2007. Elle réclame également le remboursement de ces frais, s’élevant à 240.000 francs.  

Décision du Tribunal de première instance de Dschang

Le Tribunal constate que la défenderesse, la Société S., n’a pas comparu, n’a pas conclu et n’a dès lors pas contesté les griefs de Madame T. De cette circonstance, le Tribunal considère que se traduit la pertinence des griefs de Madame T.

Le Tribunal conclut ensuite à l’existence d’un lien contractuel entre les deux parties puisque le contrat de bail a été dûment enregistré et versé au dossier de la procédure.

Le Tribunal estime que la mauvaise foi de la Société S. est établie en l’espèce, et qu’elle ressort notamment des différents actes envoyés par Madame T., auxquels la Société T. n’a donné aucune réponse, et notamment :

-          le commandement de payer du 7 janvier 2004,

-          l’ordonnance d’ouverture forcée des portes du 1er mars 2005,

-          la sommation de payer et de libérer du 16 juin 2005.

Le Tribunal rappelle ensuite que conformément à l’article 80 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général (AUDCG)2, le preneur est tenu au paiement des loyers.

Par ailleurs, en application de l’article 83 de l’Acte uniforme précité3, le preneur qui se maintient dans les lieux contre la volonté du bailleur est tenu de payer une indemnité d’occupation égale au montant du loyer fixé pendant la durée du bail.

En l’espèce, le Tribunal constate que la Société S. a continué de se maintenir dans les lieux loués contre la volonté du bailleur en emportant avec elle les clés du local et en y laissant ses affaires. En l’absence de l’Ordonnance d’ouverture, Madame T. n’aurait en outre pas pu récupérer la jouissance de son bien. Le montant des dommages et intérêts dus par la Société S. à Madame T. est évalué par le Tribunal à 875.000 francs.

Le Tribunal condamne également la Société S. à payer les neuf de mois loyers impayés, soit 450.000 francs.

Bon à savoir

Le bail commercial est un contrat synallagmatique dès lors qu’il crée des droits et des obligations tant dans le chef du bailleur que dans celui du preneur. Concernant les obligations du preneur, l’Acte uniforme précité en met trois à sa charge :

-          l’obligation de payer les loyers,

-          le bon usage des lieux loués,

-          la conservation des lieux loués.

En premier lieu, le preneur est tenu au paiement des loyers4, lequel constitue la contrepartie de la jouissance des lieux5.  

Il convient également de préciser que le loyer doit être payé par le preneur au bailleur ou à son représentant légal, aux termes fixés dans le contrat de bail6.

Le paiement des loyers est par ailleurs garanti par un privilège spécial. Ce dernier est constitué par les meubles garnissant le bien loué7.

Lorsque le preneur ne respecte pas son obligation de paiement des loyers, le bailleur est fondé à demander la résiliation du bail à la juridiction compétente8. Il doit, à cet égard, préalablement mettre le preneur en demeure de respecter ses obligations9.

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque. 

_____________________

 

1. Tribunal de première instance de Dschang, arrêt n°34 du 13 septembre 2007, www.ohada.com, Ohada J-08-122.

2. Il s’agit désormais de l’article 112 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général (AUDCG révisé).

3. Il s’agit désormais de l’article 115 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général (AUDCG révisé).

4. Article 112 AUDCG révisé.

5. J. Issa-Sayegh, « Présentation des dispositions sur le droit commercial général », www.ohada.com, p.7.

6. Tribunal de Grande Instance de Bobo-Dioulasso, Jugement du 07 décembre 2005, Jugement n° 238, Affaire : Etablissement SANGA c/ BELEM Idrissa, www.ohada.com, J-09-65 ; Article 112 de l'Acte uniforme relatif au droit commercial général.

7. Article 184 de l'Acte uniforme portant organisation des sûretés.

8. Article 133 AUDCG révisé. Voy. notamment Cour d'appel du Centre, arrêt n° 363/civ/bis du 17 octobre 2008, Affaire : MVOGO MVOGO Serges Jean Guy contre TSUDJO KAMGA Hilaire, www.ohada.com.

9. Cour d'Appel du Littoral , Arrêt du 3 novembre 2008, Arrêt n° 132/CC, Affaire : NZEPANG Pierre René contre Dame NGANJIP née CHIMI Elise, www.ohada.com, J-10-256 ; M. Dougoune, « L'encadrement du bail commercial, les hésitations entre protectionnisme et libéralisme : Étude comparative France, USA, Canada, Ohada », Jurifis Infos, N° 13 - Nov/Déc. 2013, p. 27.