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DROIT COMMERCIAL

LE BAIL COMMERCIAL

25 Octobre 2016

Section de tribunal de Dabou - Articles 74 et 75 AUDCG - Articles 106 et 107 AUDCG révisé

Présentation des faits1

Monsieur A. a loué un local commercial à Madame L. Les parties s’étaient mises d’accord pour que Monsieur A. prenne en charge les travaux de finition du local en question. En échange, Monsieur A. soutient que Madame L. a accepté de convertir les frais des travaux en dispense de paiement des loyers fixés à 40.000 francs CFA par mois.

Toutefois, malgré le fait que les travaux s’élévaient en l’espèce à 2.627.229 francs CFA, Madame L. a obtenu l’expulsion de Monsieur A. pour non paiement des loyers, soit 810.000 francs d’arriérés de loyers.

Monsieur A. a introduit une action en justice contre Madame L. afin que celle-ci soit condamnée à lui payer, d’une part, le reste des travaux, soit la somme de 1.817.229 francs, et d’autre part la somme de 300.000 francs à titre de dommages et intérêts compensant le préjudice résultant de la perte de jouissance des locaux.

Madame L. conteste avoir donné son accord pour la réalisation des travaux, et conteste ainsi l’existence de la créance. Elle base son argument sur l’article 74 de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général2.  

Décision

Le Tribunal commence par rappeler le prescrit des articles 74 et 75 de l’Acte uniforme précité. Il ressort de ces articles que les grosses réparations sont assurées par le bailleur, et à défaut pour celui-ci de les prendre en charge que le preneur peut obtenir l’autorisation de les réaliser par la juridiction compétente qui en fixe alors le prix et les modalités de leur remboursement.

Le Tribunal constate ensuite qu’en l’espèce Monsieur A. n’a pas démontré que le local en question nécessitait de grosses réparations que le bailleur aurait refusé d’effectuer ou de payer lui-même.

Le Tribunal estime également que, dans l’hypothèse où les travaux auraient effectivement été réalisés avec le consentement du bailleur, Monsieur A. ne prouve pas que Madame L. a accepté que leur remboursement s’effectue sur le prix du loyer.

Le Tribunal observe par ailleurs qu’il n’a pas saisi conformément à l’article 75 de l’Acte uniforme précité, c’est-à-dire dans le but de se faire autoriser à exécuter les travaux lui-même lorsque le bailleur est défaillant.

Par conséquent, le Tribunal considère que la preuve de l’existence des travaux n’a pas été rapportée par Monsieur A. et que même si cette preuve avait été rapportée, les travaux ne seraient pas opposables au bailleur puisque la procédure prévue à l’article 75 de l’Acte uniforme précité n’a pas été respectée.

Le Tribunal conclut dès lors au rejet de la demande de Monsieur A.

Bon à savoir

Dans le cadre du bail à usage professionnel, le bailleur est de tenu de respecter plusieurs obligations. Ces obligations sont au nombre de trois:

- l’obligation de délivrance du bien,

- l’obligation d’entretien, et

- l’obligation de garantie contre les troubles de jouissance.

Concernant l’obligation d’entretien, le bailleur doit prendre en charge toutes les grosses réparations devenues urgentes et nécessaires3. Cette obligation existe bien évidemment durant toute la durée du bail, et est basée sur le fait que le preneur a le droit de jouir de la chose louée conformément à l’usage auquel elle est destinée.

A titre exemplatif, constituent des grosses réparations, les réparations des gros murs, des voûtes, des poutres, des murs de soutènement, des murs de clotûre, des fosses septiques ainsi que des puisards4.

Dans le cas où le bailleur refuserait d’effectuer les réparations, le preneur doit saisir le tribunal compétent afin que celui-ci l’autorise à effectuer lui-même les travaux nécessaires5.

Une réduction du loyer sera octroyée au preneur pendant le temps des réparations. Cette réduction est proportionnelle au temps pendant lequel les travaux ont eu lieu, et à la perte d’usage de la chose jouée. Lorsque les réparations empêchent la jouissance du bien, le bailleur a la possibilité de réclamer la résiliation judiciaire ou la suspension du bail pendant la durée des travaux6.

En contrepartie de la jouissance du bien, le preneur a quant à lui l’obligation de payer le loyer7. Il est important de préciser que lorsque le bailleur méconnait son obligation d’entretien, le preneur n’est pas pour autant autorisé à suspendre son obligation de payer le loyer. Dans ce cas, il doit en effet saisir le tribunal pour demander la résiliation du bail ou pour se faire autoriser à exécuter les travaux lui-même pour le compte du bailleur.

 

Ndlr. : la présente analyse juridique vaut sous toute réserve généralement quelconque.  

____________________ 

 

1. Section de tribunal de Dabou, arrêt n°106 du 3 octobre 2006, www.ohada.com, Ohada J-09-186.

2. Il s’agit désormais de l’article 106 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

3. Article 106 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

4. Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, Jugement du 25 avril 2007, Jugement n° 079/07, Affaire : BAYALA Clarisse c/ Bureau des Investissements Populaires (BIP), www.ohada.com, J-09-384.

5. Article 107 de l’Acte uniforme révisé portant sur le droit commercial général.

6. A. Pedro Santos et J. Yado Toé, Ohada, Droit commercial général, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 176.

7. J. Issa-Sayegh, « Présentation des dispositions sur le droit commercial général », www.ohada.com, p.7.